Le réseau Renadoc (Réseau national documentaire) de l’Enseignement agricole a organisé un concours de booktrailers qui s’est décliné en concours régionaux.
Ce concours est ouvert à tous les niveaux de l’enseignement agricole, des classes de CAP jusqu’aux bac généraux en passant par les bacs professionnels et les bacs technologiques. Il s’agit pour les élèves de réaliser une vidéo donnant envie de lire un livre, sur le modèle d’une bande-annonce (trailer) qui doit donner envie de regarder un film. Pour participer au concours organisé en Pays de la Loire, Anaïs Cormier, qui est enseignante documentaliste au Campus de Pouillé (49) a engagé une de ses classes et a préparé le concours en pluridisciplinarité avec l’enseignante d’éducation socio-culturelle (ESC) et l’enseignante de français.
Les objectifs pédagogiques se sont déclinés en fonction des trois matières. Pour l’enseignante-documentaliste, cela a été l’occasion d’introduire les notions de droit d’auteur et de droit à l’image afin d’initier les élèves à un usage légal, respectueux et éthique des ressources trouvées sur le web mais aussi des images produites. L’enseignante d’ESC a elle travaillé sur le montage video et sur le langage cinématographique formel (comme les différents types de plan, par exemple). Enfin, l’enseignante de français a travaillé sur la lecture longue, la compréhension et l’écriture. Tous les films produits par les élèves étaient ensuite visibles par les autres établissements, via le portail e-sidoc de leur établissement ce qui a eu pour conséquence une émulation des équipes.
Apport du numérique
L’objectif de la participation à ce concours était double : faire lire et donner envie de lire mais aussi, donner aux élèves une culture numérique de base concernant les bons usages de la création de vidéo avec un smartphone. Il s’agissait donc avant tout d’éducation au numérique plutôt que de « pédagogie augmentée » par le numérique. Cependant, la mise à disposition de tablettes de type iPad sur lesquelles étaient installés le logiciel iMovie a, de par son ergonomie, faciliter grandement le aspects purement techniques. D’autres classes impliquées dans ce concours ont aussi bénéficié d’outils numériques facilitant la création de courtes séquences vidéos comme PowToon par exemple. Ce qui permet aux enseignants de pouvoir concentrer les apprentissages sur le vocabulaire formel de la création du vidéo sans que le temps dédié aux apprentissages ne soit phagocyté par les aspects purement techniques de prise en main des outils. De plus, l’usage d’outil collaboratif de type Padlet a facilité les échanges entre les différents participants de la région Pays de la Loire. Enfin, les outils numériques ont permis à la fois la création « en vrai » de vidéos mais dans un cadre sécurisés, facilitant la prise de risque que constitue le partage d’une production personnelle. En effet, les vidéos de différents participants n’étaient visibles qu’aux autres participants, via le portail e-sidoc de leur établissement.
Relation avec le thème de l’édition
Le numérique d’une manière générale et les réseaux sociaux en particulier, ont facilité l’expression des adolescents, voire leur exposition, avec les avantages et les pièges possibles que l’on connaît. Depuis quelques années, avec l’explosion des stories, elle se fait principalement sous forme vidéo. Il est donc fondamental de faire acquérir aux adolescents une culture des bons usages du numérique, qu’ils soient réglementaires ou éthiques, mais dans un cadre sécurisé et pédagogique. De plus, ce concours a eu pour effet également de les faire lire ou de leur donner envie de lire en regardant les vidéos des autres classes et donc de leur apporter des moments de déconnexion et de lecture profonde.
Synthèse et apport du retour d’usage en classe
Les élèves ont participé de cette motivation, certains élèves souhaitant reprendre leur vidéos pour les améliorer. De plus, le caractère court et attractif des booktrailers a donné envie à certains élèves des autres classes de lire aussi le livre. Concernant l’acquisition des connaissances quant au droit d’auteur et au droit à l’image, il est probant que cette séquence a participé à leur ancrage. En effet, préalablement à la création vidéo proprement dite, l’enseignante-documentaliste a formé ses élèves à l’usages des images dans le respect du droit, sous la forme d’apports, puis d’un débat et finalement d’un quiz. Et c’est au moment de créer la vidéo que les élèves ont pu concrètement mettre en œuvre leurs nouvelles connaissances. Et se rendre compte qu’il était plus facile de créer leurs propres images que d’en retrouver parmi celles qu’ils ont légalement le droit d’utiliser. Ce qu’ils ont fait largement. Cela a été l’occasion d’une sensibilisation aux licences libres afin qu’ils participent eux-aussi à l’extension de l’offre d’images utilisables par le plus grand nombre. Les élèves ont ainsi suivi tout le processus pédagogique : être exposé (cours), rappeler les notions lors des quiz, les remettre en situation lors du débat et de la phase d’argumentation et finalement les mettre en action en réalisant les vidéos..
Cette séquence a également montré le besoin d’un apprentissage formel des outils numériques même si leur généralisation via les smartphones et la simplicité apparente des outils donne l’impression d’une grande facilité. Mais cette facilité n’est « que » technique.
Elle ne permet pas la construction d’une culture numérique du bon usage de ces outils : respect du droit d’auteur et du droit à l’image, apprentissage du vocabulaire visuel de la création vidéo. Enfin, ce type de concours montre que le numérique n’est pas l’ennemi juré du livre papier mais qu’il peut participer à développer le goût de lire. D’ailleurs, le fait qu’il s’agisse d’un projet mené en pluridisciplinarité a permis de travailler tous ces aspects autour d’un seul objet.
Pour terminer, quelques mots sur les suites de ce projet. Il s’agissait de la 3e édition du concours, la première ayant été annulée par la pandémie, l’objectif pour la prochaine édition est l’augmentation du nombre de participants mais aussi une plus grande place donnée aux licences libres, notamment en demandant que les productions finales soient protégées par des licences de type Creatives commons.
À l’occasion de l’université d’été de Ludovia, 19ème édition, de nombreux enseignants et autres membres de la communauté éducative vont venir présenter leur expérience avec le numérique sur le thème de l’année, « Éthique et Sobriété numérique en éducation ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût de ces ateliers jusqu’au début de l’évènement, lundi 22 août.
Anaïs Cormier présentera l’atelier explorcamp « Un concours de booktrailers en pluridisciplinarité : respecter le droit d’auteur et débrancher pour lire … des livres », mercredi 24 août après-midi.
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