Il y a de petits territoires nichés au cœur de la France rurale où l’on pourrait penser qu’il ne se passe « pas grand-chose » et que tout est plus « simple » car moins densément peuplé. Ne croyez pas ces raccourcis ! Pour le département du Cantal, engager une réflexion sur le numérique éducatif est déjà d’actualité depuis 7 ans et c’est ce que nous explique Nathalie Lacroix, chargée de mission Numérique Éducatif au Conseil départemental du Cantal.
Aujourd’hui, la collectivité envisage le CDI de demain pour mieux appréhender les espaces et les temps d’apprentissage.
Faire table rase des problématiques « de base » avant d’engager de nouveaux usages.
Son histoire nous fait bien sûr penser à d’autres collectivités qui, elles aussi, se questionnent en permanence sur les investissements qu’elles ont faits et qu’elles doivent faire dans les collèges.
Aujourd’hui, passées les remises à niveau et les plans d’équipement en tout genre, il est temps de réfléchir aux atouts que le numérique peut apporter de manière plus globale : comment aménager les espaces, comment penser les temps d’apprentissage en utilisant différentes ressources disponibles, comment mieux mobiliser les collégiens, en quelque sorte.
Depuis 2017, le Département a repris la charge de la maintenance et des équipements dans les collèges, « pour intervenir de manière croissante dans ce domaine pour les 22 collèges publics cantaliens », explique Nathalie Lacroix.
« Ce positionnement spécifique permet d’assurer un accompagnement des usages mais surtout d’installer des équipements en adéquation avec les besoins qui sont référencés dans les établissements », poursuit-elle
Un cadre a été établi en 2018-2019, le « schéma départemental du numérique éducatif » qui permet d’intervenir de manière « phasée » dans les établissements, « car avant d’en arriver aux usages, il a fallu reprendre les bases », précise-t-elle.
Entendons « les bases », comme le câblage, la sécurisation du système d’information, le renouvellement des serveurs physiques puis une dernière phase avec la mise en œuvre d’un socle, « défini en groupe de travail numérique éducatif, composé de représentants de l’éducation nationale et des représentants de la collectivité », souligne-t-elle.
Ce groupe a défini ce qu’étaient les équipements de base dans un collège.
Aujourd’hui, ce socle se compose d’ordinateurs fixes, de classes mobiles au format ordinateurs portables et d’écrans numériques interactifs.
Pourquoi le « CDI de demain » ?
Parallèlement à cela, il y a un axe orienté « innovations et expérimentations » et c’est dans cet axe-là qu’intervient l’expérimentation qui nous intéresse plus particulièrement aujourd’hui à savoir le « CDI de demain », en repensant l’espace, le temps et les ressources dans le collège de Riom-ès-Montagne.
Il y a quelque temps, ce collège avait déjà répondu à un appel à projets, souhaitant s’équiper de liseuses. Le projet s’est fait mais « il nous a donné un écho assez contrasté », car il n’a pas enclenché d’appétence particulière pour la lecture ni même pour le numérique, comme nous l’explique Nathalie Lacroix.
A l’époque, le projet de liseuse faisait appel à une ressource en ligne pour laquelle le collège n’avait pu obtenir de financement.
Malgré, tout, la professeure documentaliste assez motivée et déterminée par les usages qui pouvaient être fait de ces liseuses, a mené plusieurs réflexions, notamment un travail auprès des élèves à besoins éducatifs particuliers, comme les élèves DYS, par exemple.
Au fur et à mesure des échanges entre les équipes enseignantes, le chef d’établissement et la Mission Numérique du CD15, le projet a finalement abouti à une expérimentation autour du « CDI de demain ».
« Dans le cadre aussi du schéma départemental, nos équipes se sont dits qu’il fallait s’inspirer de ces usages pour mener une expérimentation à la fois sur la ressource et sur un questionnement sur le CDI de demain », explique Nathalie Lacroix.
Le collège est donc lancé dans l’expérimentation à la fois pour travailler sur l’espace, au sens physique du terme, du CDI, que sur les terminaux présents que sur les espaces « virtuels », donc les ressources.
Pour cette expérimentation qui va durer 3 ans, le Département a souscrit un abonnement à la ressource Sondo.
Cette expérimentation est actuellement en cours au CDI du collège Riom-ès-Montagne, petit établissement rural au cœur du Cantal qui compte 113 élèves ; mais cette réflexion devrait être envisagée de manière plus globale, à l’échelle d’un établissement tout entier où l’on repense les installations de toutes les salles de classe, le matériel et les ressources utilisées par discipline, etc.
Le CDI du collège de Riom-ès-Montagne n’est qu’une première étape d’un long processus, comme le « cobaye » de cette expérimentation, mais un cobaye « heureux ».
« Pour l’instant, nous ne sommes pas sur un projet faramineux ; cela ne concerne qu’un seul établissement et nous avons engagé la ressource pour trois ans afin que les enseignants puissent avoir le temps de bien se l’approprier ».
Créer un lien entre les espaces physiques et les espaces virtuels pour améliorer les apprentissages
Avec cette ressource Sondo, Nathalie Lacroix espère qu’un lien va se créer entre les étagères virtuelles et les étagères physiques. « Le but du jeu n’est pas nécessairement de faire lire les élèves que sur support numérique mais de renouer avec la lecture », ajoute-t-elle.
« Nous sommes donc sur une réflexion au CDI mais pas que. Nous sommes aussi sur un travail dans l’établissement et en dehors de l’établissement notamment avec cette ressource Sondo, disponible via l’ENT des collégiens ; nous réfléchissons à mettre à disposition une version hors ligne, pour les temps de transport, par exemple », explique Nathalie Lacroix.
A cette ressource s’ajoute une réflexion sur la mixité des terminaux disponibles au CDI. Aujourd’hui, l’élève a le choix entre un ordinateur fixe, un ordinateur portable ou une tablette ; le professeur documentaliste saura le conseiller en fonction du travail que l’élève souhaite réaliser.
« Quand l’élève se présente au CDI, le professeur documentaliste pourra, après un échange avec l’élève, l’orienter vers un type de terminal ».
Si c’est un travail de groupe, l’élève pourra s’installer dans la zone prévue à cet effet avec un ordinateur portable ; si l’élève vient juste faire une petite lecture, il pourra s’installer dans le sofa avec une tablette.
L’action et l’engagement sur les ressources est quelque chose d’assez nouveau pour la collectivité. A part l’Environnement Numérique de Travail qui est en place depuis 2006, « l’acquisition d’une ressource numérique spécifique collège, poussée au sein d’une salle de cours du collège, à savoir le CDI, est une première », ajoute-t-elle.
Cela pose plusieurs questionnements qu’il sera nécessaire d’analyser : « est-ce que cela suffit ? Faut-il aller plus loin ? Est-ce que d’autres enseignants arrivent à s’en emparer ?… »
Au-delà de l’usage de la ressource Sondo au sein du CDI, les indicateurs qui intéressent Nathalie et la collectivité, c’est de savoir comment la ressource va être utilisée à l’extérieur de l’établissement ; cela poussent-ils les élèves à lire davantage et donc, par exemple, à fréquenter de nouveau la médiathèque du territoire, qui est à 2 pas du collège à pied…
Bref, de savoir si l’expérimentation menée au sein de l’établissement sort des murs en quelque sorte J
« Ce n’est pas pour tout de suite mais cela peut guider nos réflexions futures », conclut-elle.