Pour la quinzième édition du Colloque scientifique Ludovia#16, 36 communications vous seront présentées sur le thème « Numériques & représentations ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût du colloque jusqu’au début de l’événement, mardi 20 août.
Miki Okubo présentera « La représentation de soi à l’époque numérique – la considération sur la nouvelle conscience corporelle » le mercredi 21 août.
Extrait « Autoscopy », Ayano Sudo
Résumé de la communication:
Dans mon intervention, je fonderai une étude sur les modalités contemporaines de la représentation de soi à l’époque de l’information.
La représentation de soi à l’époque numérique nous fait vivre une expérience inattendue. D’abord, la représentation de soi dans le cyberespace tels que les réseaux sociaux, qui est fondée sur la manipulation facile et la diffusion quotidienne des images de soi, modifient complètement notre perception et conscience corporelle. Vivant une telle expérience de la conscience de soi « modifiée », l’image de soi perd alors sa nature identitaire jusqu’à ce qu’elle se réduise en une icône ambiguë, voire « fluide » selon le terme de Zygmunt Bauman. Cette icône, aisément employée comme image du profil, est alors considérée comme une image qui représente le soi. L’« avatar », qui est son double « modifiable » et « remplaçable » selon son gré et son envie, joue un rôle important pour établir une conscience de soi numérique. Bien qu’elle soit souvent basée sur l’image en deux dimensions tels une illustration, un dessin ou un manga, quand l’utilisateur le pousse à l’extrême, cette image prend une allure transcendante en devenant un soi virtuel mais « réel ». Soit un personnage existant soit une créature imaginaire, nous avons de plus en plus tendance à nous référer à ce qui remplace notre corps « physique » pour se présenter comme le moi numérique. Dans le cas extrême, cette nouvelle conscience corporelle pourrait s’atteindre à un état hybride : mixte du corps humain et celui du robot ou d’autres êtres technologiques.
Dans mon intervention, je développerai la théorie de la représentation de soi à l’époque numérique en me référant à l’analyse d’Azuma Hiroki, sociologue japonais qui la théorise par des notions comme « consommation de bases de données » et « de nombreux petits récits après le déclin du grand récit » (appliquant la théorie du postmodernisme de Jean-François Lyotard) afin de mieux comprendre le système contemporain autour de l’expression identitaire à travers les moyens numériques. Je compléterai mon interprétation sur la particularité identitaire de notre époque en m’appuyant sur la théorie de Zygmunt Bauman, notamment sa définition de la « fluidité ».
J’introduis ensuite Ayano Sudo, artiste photographe japonaise, et son travail d’autoportrait intitulé « Autoscopy » où l’artiste mêle sa propre image à celle de quelqu’un autre, ce qu’elle appelle une expérimentation identitaire où elle expérimente une sorte de modification génétique au travers des moyens numériques. L’artiste a conçu ce projet à cause d’un souvenir d’enfance : de nombreux amis et connaissances l’ont reconnue dans un endroit où elle n’a jamais été, ce qui signifie qu’ils l’ont mal reconnue. Cette expérience a permis l’artiste de réaliser que la reconnaissance du visage de quelqu’un est tellement ambiguë que l’on peut croire à l’avoir vue même si son visage ressemble peu à celui d’autrui. L’artiste cherche alors à créer un récit sous forme d’autoportrait modifié fondé sur les modalités corporelles numériques.
Je conclurai mon intervention sur la nouvelle conscience de soi établie par l’expérience des usages de l’avatar et de la photo de profil stéréotypée, se figurant en deux dimensions – en une forme hybride ou robotique, qui impacte notre image de soi « réelle ».
Plus d’info sur : Miki Okubo
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