Parmi les jeux numériques, les jeux pervasifs (JP) utilisent les TIC pour brouiller la perception du joueur des limites du jeu sur les plans social, spatial et temporel[1].
Cette contribution porte sur un type particulier de JP, les Alternate Reality Games sérieux (SARG). Les SARG utilisent la narration transmédia pour proposer aux joueurs une expérience hautement immersive avec une finalité « sérieuse » (éducative, etc.). La narration transmédia consiste à fragmenter une histoire et disperser ses éléments sur plusieurs plateformes médiatiques[2]. En intégrant les éléments d’un monde fictif dans le monde ordinaire du joueur, elle donne l’illusion au joueur de s’engager dans une réalité alternée.
Ainsi, en 2008, Cruel 2 B Kind proposait aux joueurs une version alternative du « Killer ». Deux différences avec le Killer permettaient d’y ajouter une dimension bien-être : a) au lieu de gages, les joueurs avaient à disposition 3 « armes » secrètes sous la forme de micro-interactions positives (compliment, sourire, etc.) ; b) les joueurs ne savaient pas qui étaient les autres participants : leur tentative d’élimination d’un adversaire pouvait tout aussi bien être dirigée contre une personne extérieure au jeu. Cette expérience entre réalité et fiction était supposée augmenter le jen ratio (mesure du bien-être dans un environnement partagé) de l’espace du jeu[3].
Le potentiel du jp sérieux a plusieurs fois été mis en évidence. Utilisé comme outil de médiation culturelle, il favorise l’appropriation affective du patrimoine par les visiteurs[4]. Il stimule la pratique sportive chez les séniors [5] et améliore le bien-être des joueurs[3].
Pour atteindre ce potentiel, les concepteurs ont besoin d’outils méthodologiques tels que des frameworks ou des typologies[6]. Parallèlement, la pratique de design visant à utiliser les travaux en psychologie positive pour en tirer des mécaniques de jeu s’appelle le happiness hacking.
Dans cette contribution, nous proposons un framework de conception qui articule les différentes dimensions des SARG et les pratiques de happiness hacking. Cet article s’organise en 3 volets. Dans le 1er, nous fournissons des repères liés aux notions d’ARG, de happiness hacking et de bien-être. Dans le 2e, nous décrirons notre démarche méthodologique. Nous introduirons notre framework dans la 3e partie.
Références :
- Montola M (2005) Exploring the Edge of the Magic Circle: Defining Pervasive Games. In: CD-ROM Proceedings of Digital Arts and Culture. Copenhagen. Danemark, pp 1–4
- Jenkins H (2006) Convergence culture: where old and new media collide. NYU Press, New York, NY, USA
- McGonigal J (2011) Reality Is Broken: Why Games Make Us Better and How They Can Change the World. Penguin (Non-Classics)
- Reid J, Clayton B, Melamed T, Hull R, Stenton P, Peirce A, Gidlow C, Holmes S (2008) The design of prisoner escape from the tower: An Interactive location aware historical game. U.K.
- Santos L, Okamoto K, Hiragi S, Yamamoto G, Sugiyama O, Aoyama T, Kuroda T (2019) Pervasive game design to evaluate social interaction effects on levels of physical activity among older adults. J Rehabil Assist Technol Eng 6:205566831984444.
- Elverdam C, Aarseth E (2007) Game Classification and Game Design: Construction Through Critical Analysis. Games Cult 2:3–22.
À l’occasion de l’université d’été de Ludovia, 20ème édition, de nombreux enseignants et autres membres de la communauté éducative vont venir présenter leur expérience avec le numérique sur le thème de l’année, « Bien-être et numérique en éducation ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût de ces ateliers jusqu’au début de l’évènement, mardi 22 août.
Diane Dufort présentera « Happiness hacking et ARG : vers un outil méthodologique pour contribuer au design d’expérience optimale des jeux en réalité alternée » sur le colloque scientifique de LUDOVIA, jeudi 24 août matin.
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