ChatGPT n’est pas particulièrement révolutionnaire affirme Yann LeCun, le scientifique en chef de l’intelligence artificielle chez Meta.
On peut lire dans article de Tiernan Ray du 23 janvier : « De tels systèmes d’IA basés sur les données ont été construits dans le passé par de nombreuses entreprises et laboratoires de recherche, a déclaré LeCun. L’idée qu’OpenAI soit seul dans son type de travail est inexacte, a-t-il déclaré. »
Ce qui est révolutionnaire est que ChatGPT est dès aujourd’hui disponible à nous tous. Quoiqu’en disent tous les gourous de l’intelligence artificielle, c’est Sam Altman et OpenIA qui ont lancé ce pavé dans la mare publique ce 30 novembre 2022.
Sam Altman[1] a 37 ans. Ce jeune entrepreneur ne serait-il pas le Steve Jobs et Bill Gates de notre époque ? Ces deux drop-out du siècle dernier se sont levés devant IBM et ont créé l’informatique pour tous avec les ordinateurs personnels à partir de la puce créée par Intel.
Google, Facebook et Microsoft ont aidé à construire l’échafaudage de l’IA. Les petites entreprises l’apportent aux masses, forçant Big Tech à réagir, lit-on dans The Washington Post[2]. Sam Altman a ouvert la porte que semblait vouloir tenir fermé les IBM contemporains que sont Google, Meta et autres Gafas.
Mon dernier billet présentait des échantillons de quelques unes des capacités de ce robot conversationnel afin de provoquer une certaine réflexion sur la question :
ChatGPT sera-t-il le Choc d’Hiroshima de l’intelligence artificielle ?
Qu’est-ce que Sam Altman, ce jeune et brillant entrepreneur dit de ChatGPT et de l’avenir des technologies ? Connie Loizos l’a rencontré et l’entrevue Stricly in Conversation with Sam Altman est disponible sur YouTube.
Sam Altman a été grandement surpris des réactions à ChatGPT. Comme plusieurs entreprises et centres de recherches travaillent au développement de tels outils, il pensait que tous s’attendaient à un éventuel dévoilement. Il conçoit toutefois que si on interroge la population au sujet des progrès en intelligence artificielle, l’idée d’un robot conversationnel ne serait peut-être pas ce à quoi ils pensent en premier lieu. Ce sont peut-être ce qui explique l’effet de surprise à la sortie de ChatGPT. Il y a aussi selon lui une erreur dans la perception de ce qu’est ChatGPT et qu’une fois l’effet de nouveauté passé, ses limites deviendront évidentes[3]. Il est toutefois conscient que ChatGPT procure une bonne expérience utilisateur (EU) et que les gens apprécient le côté dialogue avec le robot conversationnel.
Connie Loizos demande : Qu’est-ce qui vous a convaincu qu’il était temps de sortir ChatGPT ?
Sam Altman : Il est préférable d’introduire les nouveautés technologiques graduellement afin que la société puis s’adapter, absorber le choc des changement sociaux provoqués par les technologies. ChatGPT provoquera des changements sociaux, en particulier en éducation et intégrité économique[4]. Il est préférable de révéler ces technologies maintenant alors que les capacités du modèle sont encore faibles. Les sociétés absorbent difficilement de brusques et colossaux changements. Une présentation graduelle des technologies est préférable. Offrir un peu cette année, un peu plus l’an prochain. Nous sortirons d’autres avancées quand il nous semblera possible de les rendre publiques d’une façon responsable. Je pense que nous allons révéler les avancées technologiques beaucoup plus lentement que ce que la population aimerait. Nous allons rester assis plus longtemps sur certaines découvertes. Avec ChatGPT nous avons construit quelque chose et on l’a mis à la disposition des humains. Nous cherchons à donner accès à une intelligence artificielle démocratisée. Nous désirons qu’il y ait plusieurs modèles différents d’application de l’intelligence artificielle qui puissent répondre aux besoins de divers individus ou entreprises. Nous désirons aussi que ces technologies soient de plus en plus abordables et cherchons aussi en a diminuer les coûts énergétiques.
Il continue …
Sam Altman : La société devra faire des concessions. Il faut créer des lois pour se préparer à ce futur prévisible. Il faut établir ce que pourra et ne pourra pas faire l’intelligence artificielle généralisée (AGI)[5]. Nous pourrions aussi concevoir divers systèmes selon des valeurs différentes. Microsoft comprend l’état actuel de l’AGI, ses pouvoirs, ce que cette technologie peut accomplir et Microsoft peut être utile au développement d’une AGI sécuritaire, responsable et bénéfique à l’humanité […] Quant aux préoccupations en éducation, peut-être proposerons-nous d’aider de quelque façon[6]. ChatGPT n’est qu’un avant-goût de ce qui viendra[7]. Il faut que le monde de l’éducation s’adapte aux robots conversationnels comme il s’est adapté aux calculatrices.
Il répète fréquemment son point de vue :
- Notre attitude est de dévoiler graduellement à la société, aux personnes, aux institutions les avancées technologiques au lieu de les révéler tout d’un coup.
- Il faut commencer maintenant à préparer la population, les institutions et les législateurs à la montée d’une intelligence artificielle de plus en plus performante. C’est pourquoi nous avons sorti ChatGPT, pendant que les capacités des systèmes sont encore relativement faibles car les sociétés ne sont pas en mesure d’absorber des changements drastiques. C’est ce que nous croyons faire quand nous disons que nous révélons les technologies de façon sécuritaire et responsable.
- Les sorties de technologies plus performantes seront beaucoup plus lentes que plusieurs personnes aimeraient . Il croit qu’avec le temps, les gens seront satisfaits d’une telle approche. Les gens qui s’attendent à une AGI seront déçus.
- Quant aux lois je pense que le modèle des lois relatives à la liberté d’expression sont un modèle intéressant. Ces lois régissent globalement la liberté d’expression au sein des sociétés mais les individus les appliquent selon leur croyance et leur philosophie personnelle.
[1] Dubois, Alice. (2023).Qui est Sam Altman, l’homme derrière ChatGPT ? Les Échos Start.
[2] Google, Facebook and Microsoft helped build the scaffolding of AI. Smaller companies are taking it to the masses, forcing Big Tech to react. Nitasha Tiku, Gerrit De Vynck and Will Oremus, (January 27, 2023) Big Tech was moving cautiously on AI. Then came ChatGPT.
[3] Plusieurs articles ont été publiés qui effectivement mettent en relief les limites de l’outil. L’article du 28 janvier de Pascal Vangrunderbeeck du Louvain Learning Lab Une compréhension critique de ChatGPT.
Voir la vidéo de Monsieur PHI, De quoi ChatGPT est-il VRAIMENT capable ? | Ft. Science4All
[4] Termium Plus, La banque de données terminologiques et linguistiques du gouvernement du Canada définit ainsi l’intégrité économique :
L’intégrité économique désigne la confiance des consommateurs et des investisseurs dans les systèmes financier, monétaire et commercial d’un pays. Lorsque les consommateurs et les investisseurs sont victimes de crimes économiques, leur confiance dans le système est ébranlée. Par exemple, les victimes peuvent en venir à craindre d’utiliser certains modes de paiement, même lorsque les transactions sont légitimes et sûres.
[5] Définition – Artificial General Intelligence (AGI) : L’intelligence générale artificielle (AGI) est la représentation des capacités cognitives humaines généralisées dans un logiciel afin que, face à une tâche peu familière, le système d’IA puisse trouver une solution. Un système AGI pourrait théoriquement effectuer n’importe quelle tâche dont un humain est capable.
[6] Jean-Yves Alric, 5 janvier 2023, ChatGPT va proposer l’arme ultime contre le plagiat de l’IA, PresseCitron.
[7] Jean-Yves Alric, 16 janvier 2023, ChatGPT va bientôt devenir 570 fois plus puissant, personne n’est prêt, PresseCitron.
Article rédigé par Ninon Louise LePage