Pierre Florek est professeur de mathématiques au collège Pierre de Ronsard à Poitiers, référent numérique dans cet établissement classé en REP et également formateur.
Il nous fait partager aujourd’hui son expérience et sa réflexion sur l’espace classe ou comment il a aménagé l’espace pour répondre à ses besoins pédagogiques.
Nous l’avons interviewé et il nous a bien gentiment envoyé plusieurs photos pour agrémenter son propos. C’est de manière très humble qu’il partage son expérience : loin de lui l’idée de vouloir imposer son modèle qui correspond à sa situation et à ses « envies » en matière de pédagogie ; il ne voit pas son choix comme le modèle parfait à adopter par tout le monde !
Au départ…
Depuis 2016, il gère un projet d’implantation de tablettes dans le collège, des tablettes de type iPad, dont chaque élève du collège a été doté par le Département et qui accompagne désormais leur quotidien, au collège et à la maison.
En quelque sorte, ce projet lui a mis le pied à l’étrier, car cela fait longtemps que Pierre se pose des questions sur la façon de « motiver » davantage ses élèves dans sa discipline, les rendre plus actifs, ou moins passifs, étant persuadé que la simple tablette n’allait pas tout révolutionner.
« C’est bien d’avoir les tablettes mais j’avais aussi vraiment besoin d’aménager l’espace classe, pour optimiser encore plus les usages ».
« Si c’est pour avoir une classe standard de style autobus où chaque élève est à sa table avec sa tablette, je trouve qu’on perd un peu d’intérêt ; moi je vois la tablette comme un outil efficace pour mettre en place la différenciation, pour que chacun travaille à son rythme », explique-t-il.
Son espace classe
Il dit avoir de la chance d’être toujours dans la même salle pour faire classe constituée d’un très grand espace ce qui lui permet d’envisager différentes choses.
Au fur et à mesure de sa réflexion, il a donc investi la pièce avec plusieurs types de mobilier : des tables hautes avec des télés, du mobilier mobile style chaises à roulettes, du mobilier classique bureau fixe, des ballons en guise de siège, …
« Ce qui est important pour moi, c’est d’avoir plusieurs espaces mais surtout plusieurs tableaux, et pas nécessairement des tableaux numériques ».
« Avec le tableau, ils se mettent en posture du prof, où ils expliquent aux autres ».
Question investissement en matériel, pour l’instant, Pierre a choisi le mode « débrouille » ; à part les chaises à roulettes qui ont été financées par le Département en guise d’expérimentation, les tables hautes, les télés etc ne sont que du matériel de récup !
Pour dire qu’il n’est pas obligatoire pas de faire des investissements énormes pour pouvoir envisager ce type de disposition de classe.
Comme la salle de Pierre est grande, il a pu amener une mixité de matériel afin de pouvoir tester plusieurs formats et donner le choix aux élèves.
« Pour moi, être en classe c’est vraiment être dans l’esprit de se sentir bien, d’avoir une posture où tu es à l’aise pour pouvoir travailler », souligne-t-il.
Fonctionnement des élèves dans cet espace
Les élèves arrivent dans la classe et se mettent par petits groupes ou parfois seuls ; ils font selon leur envie et peuvent choisir de se placer par affinité. Pour l’enseignant, il est important que les élèves se sentent en confiance lorsqu’ils arrivent en cours de maths, comme il le fait remarquer :
« Le fait que les élèves puissent se mettre comme ils veulent fait qu’ils ont bien compris mon fonctionnement et au final, ça fonctionne plutôt bien ; mais c’est MA façon de fonctionner ».
« J’aime qu’ils soient en confiance car les mathématiques, c’est déjà une matière qui n’est pas facile pour eux ».
Et il ajoute que quand des élèves ne sont pas là pour travailler, il le remarque vite !
Les élèves ont complètement adhéré au concept ; ils cherchent même à venir dans la salle de leur professeur de maths quand ils ont des heures de permanence.
« Ils aiment être dans cette salle ; il ne se sentent pas oppressés car ils vont à leur rythme », ajoute-t-il.
Un espace en mouvement où rien n’est figé
Pierre est toujours en réflexion sur son espace classe qui n’est pas figé. Il envisage des nouveaux aménagements, au vu aussi des comportements de ses élèves.
Aujourd’hui, s’il émettait un souhait, ce serait de pouvoir faire rentrer plus de mobilier style chaise haute et des mobiliers bas ; il va également aménager un pan de mur en fond vert, pour permettre aux élèves d’enregistrer des capsules vidéo, des corrections d’exercices, par exemple.
Enfin, il aimerait laisser que ses élèves puissent écrire librement sur un mur, de pouvoir s’exprimer, faire des démonstrations…, « ce qui pourrait leur laisser la possibilité de réfléchir à plusieurs car le tableau peut s’avérer parfois limité ».
Pierre s’est inspiré de plusieurs séjours au Québec pour piocher des idées d’aménagement de classe, même si là-bas, il précise que la liberté de meubler sa classe va bien au-delà de ce qu’on peut faire en France.
La salle de Pierre accueille plusieurs jeudis matin et parfois les vendredis, les élèves de CM2 des écoles REP du quartier. A termes, elle a été choisie pour devenir Laboratoire de mathématiques au niveau du département et va donc pouvoir bénéficier de nouveaux matériels (notamment des écrans interactifs pour remplacer les vieilles télés).
C’est donc les valeurs de partage et d’échange qui sont les fondements de ce lieu de travail.
« C’est agréable car parfois, je passe dans la classe et j’ai l’impression de ne servir à rien. Je vois un élève qui explique la notion aux autres et je trouve ça génial ; je ne suis que l’animateur finalement. Je rends les élèves plus acteurs et je leur apprends l’autonomie » .
« Je me régale plus à travailler comme ça que de vouloir que tous mes élèves m’écoutent en même temps » .
En espérant que cet article vous aura été utile. A vous de jouer pour votre espace classe !