L’identification et la valorisation des compétences favorisent le renforcement du pouvoir d’action, notamment par le développement d’un sentiment de compétence. C’est ce que nous souhaitons faire émerger chez les participants grâce à la réalisation d’un jeu, et de Way-Up..
Notre objectif en imaginant et en concevant Way-Up était de permettre à des personnes éloignées du monde de l’emploi de prendre conscience de leurs compétences, de pouvoir les identifier et les valoriser à travers l’utilisation d’un outil ludique.
L’identification et la valorisation des compétences favorisent le renforcement du pouvoir d’action, notamment par le développement d’un sentiment de compétence. C’est ce que nous souhaitons faire émerger chez les participants. La réalisation d’un jeu, et de Way-Up en particulier, mobilise de nombreuses compétences (collaboration, créativité, apprendre à apprendre, organisation, communication etc.).
La valorisation des compétences acquises et du résultat obtenu, fruit d’un travail individuel et collectif, vise la remobilisation des participants sur les actions qui leur sont ensuite proposées – situations professionnelles, démarches de projet, implication dans l’apprentissage autour d’un sujet en particulier.
Nous faisons le constat – à travers notamment nos actions à destination des personnes allocataires du RSA ou des jeunes de missions locales – que ces personnes ne se sentent plus en capacité de faire. On parle ici d’un déficit du sentiment de compétence, nécessaire à la mise en action. Selon Albert Bandura, psychologue socio-cognitiviste, le sentiment d’efficacité personnelle, c’est-à-dire la croyance en sa capacité à réussir une tâche est prédictive de la réussite.
Maîtriser des compétences pour réaliser une tâche n’est donc pas suffisant, encore faut-il se sentir capable de pouvoir les mobiliser.
« Des personnes différentes avec des aptitudes identiques, ou la même personne dans des circonstances différentes, peuvent obtenir des performances faibles, bonnes ou remarquables, selon les variations de leur croyance d’efficacité personnelle. Certes le niveau de compétences influe sur les performances obtenues, mais son impact est fortement médiatisé par les croyances d’efficacité personnelle ».
Nous avons choisi le jeu comme outil de médiation à l’identification des compétences, et l’apprentissage autour d’une thématique particulière car cela renvoie à la sphère du plaisir et non à celle de l’apprentissage. On évoque notamment la boucle d’engagement. Il s’agit de proposer des activités perçues comme ludiques – qui suscitent l’intérêt de l’apprenant ; le passage à l’action doit ensuite rester un plaisir – l’activité est accessible, mais doit nécessiter un effort, condition de l’émergence d’un sentiment de compétence ; un feedback est proposé enfin sur les résultats de l’action – il entretient la motivation à apprendre.
Way-up se présente comme un outil ludique, qui permet de concevoir un jeu amenant à découvrir un sujet ou une problématique et à débattre autour de ces derniers. C’est pourquoi il reste adaptable à toute proposition de sujets – imposés par l’animateur ou bien choisis collectivement par les participants. La méthodologie et l’approche pédagogique sont basées sur deux éléments fondamentaux pour favoriser l’émergence du sentiment de compétence : un processus réflexif mis en œuvre tout au long du jeu, ainsi que l’obtention d’un résultat tangible qui pourra être mis à profit d’autres personnes. Les participants sont incités tout au long de la partie à être dans une dynamique de participation active.
Apport du numérique :
La version numérique de Way-up offre de nombreux avantages. Le premier, et le plus évident face à la crise sanitaire actuelle, est la possibilité de maintenir un lien social malgré les confinements successifs et les règles de distanciation sociale. Le deuxième avantage répond à une difficulté que notre public éloigné de l’emploi rencontre tout particulièrement : une mobilité complexe et réduite. Difficulté qui peut être retrouvée également chez un public jeune et étudiant : pas de permis de conduire, peu de transports en communs, difficultés financières, manque de motivation etc.
Le numérique devient alors une solution pour aller vers eux, pour aller vers ces jeunes qui ne peuvent se déplacer à la Mission Locale, dans les centres sociaux ou les établissements scolaires et universitaires. Ici le numérique devient créateur d’opportunité de liens et permet de développer des compétences pour lutter contre le sentiment d’exclusion sociale, la dépression dus au manque de mobilité et/ou à la pandémie. Les personnes éloignées de l’emploi et les étudiants sont tout particulièrement touchés par ce phénomène.
L’outil permet également aux participants d’émanciper leur pratique numérique. Ils reçoivent un logiciel à télécharger et sont accompagnés par l’animateur dans la mise en place de leur écran. Au cours de la partie, ils sont amenés à alterner entre activités ludiques, activités réflexives et activités de recherches d’informations. Ils sont invités à se questionner sur la fiabilité d’une information, à faire des choix, à trouver des astuces pour explorer la problématique choisie…
Relation avec le thème numérique et social :
Le thème de l’édition auquel nous avons choisi de rattacher notre présentation est la culture du numérique. Way-up se présente comme une solution à la fois contre l’illectronisme et le décrochage social, grâce à l’aspect collaboratif et à l’esprit collectif nécessaire au bon déroulement de la session. Chacun des participants tient un rôle précis qu’il a choisi en amont. La responsabilité collective prend une place importante et engage le participant à atteindre l’objectif : apprendre et développer des réflexions autour d’un sujet tout en développant ses compétences transverses individuelles.
Quel que soit le sujet mis en avant il peut être abordé grâce aux outils numériques. Chacun peut s’approprier, en fonction de ses habiletés, la connaissance et le savoir autour du sujet, évitant ainsi l’inégalité des chances et mettant le lien social au cœur des principes d’actions.
Synthèse et apport du retour d’usage en classe :
Nous avons eu l’occasion de tester l’outil numérique à plusieurs reprises et face à divers publics : des adultes bénéficiaires du RSA ou encore des jeunes de plusieurs Mission Locales.
L’outil a pu être amélioré grâce aux retours des utilisateurs mais chaque séance a eu le résultat escompté et a été pour nous comme pour les utilisateurs, instructive et satisfaisante.
Nous pouvons témoigner du réel avantage qu’apporte le jeu comme support pédagogique. Au cours de ces séances plusieurs thématiques ont été abordées : L’Histoire de France, la musique, le harcèlement, le cinéma Français etc. ; toutes ont permis aux participants d’attiser leur curiosité, de réfléchir, débattre, communiquer, chercher de l’information…
Autant de compétences qu’ils ont pu mobiliser afin d’apprendre autour d’un sujet sans percevoir « d’efforts à fournir ». Cela leur a donc permis de se sentir capable et de se sentir compétent tout en repartant plus cultivés et armés sur le sujet particulier.
Au départ, nous avions créé ce jeu pédagogique sur plateau afin de rassembler le public pour y jouer physiquement. Mais le contexte sanitaire nous a amené à repenser l’outil et faire en sorte de pouvoir l’utiliser à distance. Il s’avère que cela a été pour nous une opportunité de développer les pratiques autour de Way-Up, car le numérique offrait la possibilité du distanciel et/ou du présentiel et permettait de faire face aux contraintes sanitaires et de mobilités.
Les craintes des participants concernant le numérique résidaient dans le fait de perdre l’esprit de convivialité. Comme exprimé précédemment, nous avons fait en sorte de rendre l’outil le plus guidé et ludique possible. Ainsi, l’utilisation de l’outil à distance ne représente pas une difficulté ; chacun peut se voir et s’entendre (outil de visio utilisé Whereby), l’esprit de convivialité a perduré.
La plupart des sessions ayant été organisées en période de confinement, nous avons reçu des témoignages de participants qui insistaient sur le plaisir de pouvoir au cours de ces périodes d’isolement, conserver un lien social. L’essence même du jeu pédagogique en numérique s’est avéré être créateur de lien social, tout en faisant perdurer l’apprentissage.
Voici quelques retours de participants :
« J’ai beaucoup aimé l’activité Way-Up. J’ai trouvé cela original, et cela nous a permis d’exprimer nos opinions tous en s’écoutant. Je pense que nous avons fait tous un bon travail pour trouver des questions et des réponses. »
« J’ai apprécié l’atelier en général et j’ai trouvé ça cool de parler d’un sujet sensible et d’en connaître les différents points de vue. »
« J’ai bien aimé l’atelier, cela m’a permis de renforcer des compétences comme l’argumentation. »
« Le thème de la séance (harcèlement) était un bon choix, vaste et intéressant, la construction autour des énigmes et des actions permet de s’immerger complètement tout en ayant des pistes de réflexion personnelles. De mon point de vue, le travail d’observation est très agréable. En soi, j’ai trouvé le principe de cet atelier plaisant. On peut en apprendre sur soi ou encore affirmer des compétences d’éloquence. De mon côté j’ai pu conformer ma capacité à m’adapter à un groupe et ainsi être productif en accord avec les autres membres. »
Plus d’infos sur : Manon Milliet & Charlène Mercier
À l’occasion de l’université d’été de Ludovia, 18ème édition, de nombreux enseignants et autres membres de la communauté éducative vont venir présenter leur expérience avec le numérique sur le thème de l’année, « Le numérique éducatif est-il social ? ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût de ces ateliers jusqu’au début de l’évènement, lundi 23 août.
Manon Milliet & Charlène Mercier présenteront « Way-Up : Apprendre à travers le jeu collaboratif sur un espace numérique » sur la session IV « CULTURE NUMERIQUE », mercredi 25 août après-midi.
Retrouvez tous les articles sur Ludovia#18 et toutes les présentations d’ateliers sur notre page dédiée.