Pour la 17ème édition du Colloque scientifique à Ludovia#18, 28 communications vous seront présentées sur le thème « Numériques & social ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût du colloque jusqu’au début de l’événement, lundi 23 août.
Alyse Yilmaz et David Puzos présenteront « Les politiques de diffusion et de formation des TIC au prisme des théories de la justice sociale » sur la session I « Numérique, démocratie, justice sociale », lundi 23 août après-midi.
L’enjeu de cette communication est d’analyser la manière dont les Politiques de Diffusion et de Formation des Technologies de l’Information et de la Communication (PDF TIC) sont imbriquées dans des conceptions de la justice sociale. A travers la réalisation d’une revue de littérature, nous avons pu dégager trois grandes orientations concernant ces politiques, autour desquelles nous organiserons notre communication.
De 1980 aux années 2000, en France, les PDF TIC se sont centrées principalement autour de logiques de rattrapage, qui se sont notamment incarnées aux travers de politiques de lutte contre la fracture numérique. Cette conception s’appuie en grande partie sur l’utopie de la société de l’information (SI). En effet, la SI, telle qu’elle est théorisée par la cybernétique, apparaît alors comme idéal politique et fait de l’information, un élément essentiel pour pouvoir faire face aux défis nouveaux de la modernité, un élément de lutte contre l’entropie et le désordre. Les TIC sont alors considérés comme des bienfaits destinés à tous. Aussi, les politiques de rattrapage ont principalement eu pour effet de soutenir une vision du progrès techno-centrée et libérale. Seulement la littérature autour de la fracture et des inégalités numériques montre qu’il ne suffit pas de mettre à disposition des équipements pour les supprimer et que cette approche délégataire tend à reproduire des injustices[1].
Au milieu des années 2000, les politiques en matière de diffusion des TIC évoluent peu à peu pour passer d’une logique d’équipement à une logique d’accompagnement aux usages. En 2006, lors de la déclaration de Riga, voit le jour la notion d’inclusion numérique qui donne une coloration politique et sociale encore plus forte aux PDF TIC (Le Mentec, 2010). Ce changement de vocable témoigne d’une évolution profonde : il s’agit d’un passage d’une logique centrée sur la diffusion des TIC à une logique que l’on peut qualifier d’ “anthropocentrée ». L’enjeu est alors de mettre en place un certain nombre d’actions de formation à destination de publics “vulnérables” dans un souci d’égalité des chances et d’autonomie. Seulement, la logique d’inclusion comporte quelques limites : il ne suffit pas de mettre en place un certain nombre de moyens selon une approche ressourciste pour que les individus puissent en tirer un profit réel. Encore faut-il qu’ils aient effectivement la possibilité de pouvoir s’en saisir et qu’ils souhaitent le faire.
Le contexte actuel impose de repenser les PDF TIC. Notre communication vise alors à interroger les enjeux de la PDF aux usages des TIC en s’appuyant sur la conception de la justice sociale telle qu’elle est développée dans l’approche par les capabilités d’Amartya Sen (1992). Le paradigme des capabilités implique alors de repérer des facteurs permettant de mettre en œuvre le pouvoir d’agir des personnes. Ces facteurs sont des éléments qui aident les personnes à s’approprier des ressources en vue de les convertir en pouvoir d’agir. Ainsi, les capabilités font référence aux possibilités réelles d’accomplissement qui s’offrent à un individu. Sen introduit également la notion de liberté de choix, donnant à voir l’expression des préférences, des engagements et des besoins individuels.
[1] Au sens où les mieux dotés tirent globalement le plus d’avantages des Technologies de l’Information et de la Communication
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