À l’occasion de l’université d’été de Ludovia, 18ème édition, de nombreux enseignants et autres membres de la communauté éducative vont venir présenter leur expérience avec le numérique sur le thème de l’année, « Le numérique éducatif est-il social ? ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût de ces ateliers jusqu’au début de l’évènement, lundi 23 août.
David Gachet présentera « Favoriser le désenclavement numérique des archipels Polynésiennes avec la Moodlebox » sur la session III « TERRITOIRES, ESPACES ET TEMPS D’APPRENTISSAGE », mercredi 25 août matin.
Problématique pédagogique:
En Polynésie Française, seules Tahiti et les îles sous le vent possèdent une bonne connexion à internet. Dans les autres Archipels, la connexion et de moindre qualité et l’ensemble des écoles de la Polynésie ont un accès à internet limité. De plus, peu de familles disposent d’un accès au numérique. La plupart des écoles primaires de Polynésie disposent d’une dotation de Ipad (environ 10 minimum par écoles) mais sont peu utilisés faute de connexion et de motivation des enseignants à l’utilisation du numérique.
L’utilisation du numérique à l’école, dont le projet expérimental en fait usage, s’inscrit dans la politique éducative du pays dont les orientations et objectifs sont précisés dans la lettre de rentrée n°4071/MEJ du 5 août 2019, du Ministère de l’éducation, de la jeunesse et des sports. On retrouve les paragraphes suivants :
- La formation, l’innovation, l’expérimentation, des leviers de l’évolution des pratiques pédagogiques pour mieux répondre aux besoins de tous les élèves.
- Le développement du numérique.
Face à ce constat, nous avons décidé d’expérimenter l’usage en école primaire et maternelle d’une version de Moodle, hébergée sur un Raspberry Pi avec une connexion wifi. Les objectifs étaient de :
- Expérimenter en école primaire et maternelle l’usage de Moodle.
- Inciter les enseignants à développer l’usage du numérique avec leurs élèves.
- Développer les compétences numériques des élèves.
- Favoriser la réussite de tous les élèves, par des parcours diversifiés tenant compte des difficultés des élèves, gérer l’hétérogénéité à l’aide du numérique.
Apport du numérique :
L’utilisation de la Moodlebox permet de créer un réseau numérique au sein de la classe tout en évitant l’accès pour des jeunes enfants à des contenus sensibles et inadaptés à leur âge. Il a été possible de créer un forum permettant aux élèves d’échanger entre eux sur des thèmes de discussion, sans utiliser un réseau social.
Le fait de se connecter avec des identifiants permet d’initier en cycle 3, à l’accès à des réseau et à un ENT. En contre partie, cette identification permet à l’enseignant de suivre via les outils de moodle le parcours et le développement des compétences des élèves.
Les différents outils de moodle permettent de diversifier les activités proposées de créer des parcours individualisés. Pour certaines activités liées à la compréhension de texte, de grammaire, nous avons ajouté la possibilité aux élèves en difficulté d’entendre la consigne ou bien la lecture du texte.
Les modules H5P, intégrés à Moodle ont permis de mettre en place des activités interactives favorisant la motivation des élèves et la ludéification des activités et des parcours. De plus, il est alors possible de réaliser des vidéos interactives favorisant la mise en activité des élèves tout en visionnant des vidéos et la mémorisation des notions importantes contenues dans ces supports vidéos.
De plus, pour favoriser la navigation des plus jeunes, nous avons intégrés dans moodle des genially ce qui a permis d’accéder directement aux activités sans passer par l’arborisation de moodle.
Relation avec le thème :
Une des leçons tirées de l’expérience de continuité pédagogique est que la plupart de nos élèves ne maitrisent pas du tout les compétences numériques et ont de grandes difficultés avec les ENT, les espaces de formations en ligne. Il est donc essentiel de sensibiliser dès l’école primaire à l’usage de plateforme numérique. De plus, cette expérimentation montre l’importance du décalage d’usages entre élèves selon leur lieu de vie, leur milieu social. L’école apparait bien comme le lieu pour diminuer ses différences et avoir un socle de compétence numérique commun à l’ensemble des élèves.
Synthèse et apport du retour d’usage en classe :
- Les enseignants
Après quelques appréhensions en début de semaine, les enseignants ont montré un grand intérêt pour l’outil et se sont portés tous volontaires pour conduire la suite des séances. Ils ont très rapidement envisagé l’usage futur de l’outil dans d’autres disciplines comme en mathématiques ou en coin d’écoute pour les élèves de maternelle. La demande de construire des activités sous format « moodle » a été centrale mais cela nécessite quelques pré-requis et une formation supplémentaire. Cependant, l’activité « mémory » sous H5P a ravi les enseignants qui ont pu produire quelques exemples.
Les enseignants ont aussi remarqué des changements dans leur posture face aux élèves ; ils ne sont plus perçus uniquement comme un évaluateur mais plus comme un accompagnateur vers qui les élèves peuvent se tourner pour solliciter de l’aide en cas de besoin. Pour des raisons pratiques, les enseignants ont apprécié le fait de se connecter, sans difficulté, au réseau local directement en classe plutôt qu’en salle de ressources. Et ils ont même ajouté que cela permettait une économie de papier et un gain de temps dans la préparation matérielle des activités.
- Leurs observations des élèves
Les enseignants ont noté une forte motivation des élèves non seulement pour les tablettes mais aussi pour l’interactivité des parcours ; cela a représenté un ensemble de stimuli positifs pour progresser. De plus, la progression dans les activités fut favorisée d’une part, par un accès facilité aux médias en guise d’aide notamment ; par exemple une aide audio pour les élèves non lecteurs ou des étiquettes à déplacer, et d’autre part, par les notifications indiquant le score de réussite avec la possibilité de faire d’autres essais en vue d’améliorer son score (option « feedback »). Les enseignants ont relevé que l’erreur devenait alors une étape dans l’apprentissage, elle n’est plus stigmatisée comme dans un modèle transmissif mais plutôt reconnue et pris en compte pour la construction du savoir. Du coup, les élèves ont pu s’autocorriger voire s’autoévaluer durant les activités.
Du côté des élèves, ceux-ci ont beaucoup apprécié la liberté qui leur a été donnée de s’exprimer à l’écrit plutôt qu’à l’oral dans le forum, même si celle-ci fut contrôlée par l’enseignant à leur insu. En définitive, chaque élève avance à son rythme de manière autonome ; ce qui libère l’enseignant pour accompagner les élèves en écart d’apprentissage.
Plus d’infos sur : David Gachet
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