À l’occasion de l’université d’été de Ludovia, 18ème édition, de nombreux enseignants et autres membres de la communauté éducative vont venir présenter leur expérience avec le numérique sur le thème de l’année, « Le numérique éducatif est-il social ? ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût de ces ateliers jusqu’au début de l’évènement, lundi 23 août.
Arnaud Vincent présentera « Je corrige, j’annote, je souligne, mais apprennent-ils ? Optimiser le feedback correctif écrit grâce à l’annotateur MARKIN » sur la session II « L’ACCÈS AUX RESSOURCES ET AUX CONTENUS PÉDAGOGIQUES DANS UNE SOCIÉTÉ NUMÉRIQUE », mardi 24 août après-midi.
Problématique pédagogique :
Pour les enseignants de langues étrangères, la correction régulière d’expressions écrites est une pratique perçue comme essentielle malgré sa nature chronophage et le constat sur le terrain d’une efficacité pédagogique parfois toute relative pour les élèves qui ne semblent pas – ou peu – apprendre de leurs erreurs. Ce travail de correction peut paraître d’autant plus lourd qu’il est généralement vécu comme une tâche solitaire et qu’il s’accompagne d’une obligation d’égalité de traitement pour tous les élèves, indépendamment du temps disponible, du nombre de copies ou de leur place dans la pile souvent très (trop) conséquente à corriger. Si dans l’idéal chaque élève est en droit de recevoir un feedback détaillé lui permettant non seulement de comprendre ses erreurs mais surtout d’identifier les manières de les éviter dans ses futures productions, dans la réalité, les copies remises aux élèves ne leur offrent que trop rarement un parcours de remédiation taillé sur mesure et dont les étapes leur apparaissent clairement. En lieu et place de ce feedback riche en informations utiles, les rétroactions que les élèves reçoivent se limitent bien souvent à quelques annotations écrites à la main et dans la marge, à des signes et symboles plus ou moins lisibles et des brèves injonctions à retravailler certains points de matière.
Dans ce contexte où les contraintes du terrain imposent souvent de s’engager dans une pratique de feedback « a minima », l’exercice de l’expression écrite peut être source d’incompréhension, d’inconfort et de démotivation, à la fois pour les élèves qui ne parviennent pas à dégager des enseignements du feedback remis, mais également pour les enseignants qui consacrent une énergie considérable pour tenter de faire évoluer ceux-là mêmes qui ont le plus de difficultés à traiter les informations reçues au travers de la correction. Pour ces élèves en difficulté, l’erreur n’est pas perçue comme une occasion d’apprendre et d’évoluer, elle a tout au plus une valeur de sanction.
Dans cette intervention, je montrerai comment l’annotateur MARKIN pourra être utilisé pour engager chaque élève dans un parcours de remédiation hybride spécifique aux erreurs commises ou aux besoins identifiés par l’enseignant. En combinant MARKIN à des contenus de remédiation en ligne de bonne qualité pédagogique, le feedback produit par cet annotateur permet à chaque élève de comprendre ses erreurs, d’en identifier les catégories et les fréquences, et de suivre une remédiation sur mesure faite d’étapes clairement identifiées.
Outre les solutions qu’il apporte aux problématiques soulignées en amont – et sans prétendre qu’il permette de faire disparaître entièrement ces dernières – MARKIN offre d’autres avantages. J’évoquerai notamment son utilisation dans une démarche collaborative entre enseignants et expliquerai comment cette utilisation invite le groupe à co-construire des contenus de remédiation et à repenser le statut de l’erreur, les pratiques de feedback, ou encore la cohérence qu’il est possible d’apporter dans la correction des expressions écrites. Enfin, il sera également question d’analyser les erreurs des apprenants pour mesurer et récompenser l’évolution de chacun d’entre eux – indépendamment du niveau de départ – mais également pour mieux comprendre et dès lors traiter les erreurs qui seraient spécifiques tantôt à un groupe, tantôt à un niveau, ou encore à une année particulière.
Apport du numérique :
Les apports de l’outil numérique MARKIN sont multiples. Il permet d’optimiser le feedback dans des proportions difficilement atteignables sans le numérique. En tant qu’annotateur, MARKIN permet de produire des rétroactions précises et facilement interprétables par l’élève, en plus d’un relevé quantitatif et qualitatif des erreurs qui pourra intégrer tantôt une analyse longitudinale visant une meilleure mesure de la progression individuelle, tantôt une analyse sur base de variables à une échelle plus large (niveaux, années, options,…).
En plus de sa fonction d’annotateur, MARKIN va également permettre de différencier le feedback en dirigeant chaque élève vers un parcours de remédiation unique et spécifique aux erreurs commises ou aux besoins identifiés par l’enseignant. Les étapes de ce parcours prendront typiquement (mais pas exclusivement) la forme d’hyperliens menant à des contenus sélectionnés ou produits par les enseignants et permettant le déploiement d’une modalité de remédiation hybride. L’important saut qualitatif du feedback que MARKIN permet ne se fait pas au détriment de la nécessaire égalité de traitement entre les élèves, de la cohérence à assurer dans la correction de chaque copie, ou du temps disponible pour chacune d’entre elles. Bien au contraire, MARKIN permet d’aller chercher chaque élève là où il se trouve et de lui proposer des étapes de progression claires et – selon toute vraisemblance – plus engageantes. Chaque annotation étant générée par un simple bouton préalablement paramétré par l’enseignant, MARKIN aide ce dernier à ne pas diminuer la quantité ou la qualité du feedback au fur et à mesure que les corrections se multiplient.
Dans la mesure où MARKIN peut être un outil développé à l’échelle institutionnelle, réfléchi et paramétré en collaboration et associé à des contenus également co-construits par des groupes d’enseignants, MARKIN offre une possibilité d’augmenter la cohérence dans les pratiques de feedback tout en donnant à ces dernières une nature plus collaborative. Enfin – dans le contexte d’enseignement à distance qui s’est imposé à l’échelle de la planète suite à la pandémie COVID-19 – il ne semble pas purement anecdotique de préciser que MARKIN apporte une solution concrète pour corriger les documents que les élèves proposent au format numérique.
Relation avec le thème de l’édition :
La présentation mettra en exergue les avantages collaboratifs et motivationnels de l’outil d’annotation MARKIN ainsi que la modification du rapport à l’erreur à laquelle il invite. Parce qu’il permet de produire un feedback différencié où chaque élève pourra clairement identifier les étapes nécessaires à entreprendre pour progresser, MARKIN permet de réduire les inégalités induites par les différences de niveau de maîtrise et par les difficultés qu’éprouvent les élèves les plus faibles à traiter les rétroactions correctives écrites et à apprendre de leurs erreurs. Par ces effets, MARKIN permet de remobiliser les élèves les plus en difficulté et les inscrire dans une logique d’évolution possible pour toutes et tous et non plus de sanction et abandon des plus faibles. Les observations faites en classe et les témoignages recueillis indiquent également que les élèves apprécient le feedback produit par MARKIN car celui-ci donne – au travers des copies remises aux élèves – une impression de présence et de collaboration avec l’enseignant plus grande et pour chacun. Pour les enseignants, MARKIN offre la possibilité de collaborer sur les pratiques de rétroaction écrite et de les rendre plus cohérentes au niveau de l’institution. Il invite également à la co-construction des contenus de remédiation proposés aux élèves.
Synthèse et apport du retour d’usage en classe :
Dans la présentation, je partagerai mon expérience d’utilisation de l’annotateur MARKIN dans le cadre des cours d’anglais que je dispense dans l’enseignement secondaire supérieur francophone de Belgique. Si l’expérience de terrain de plusieurs années n’a pas été accompagnée d’une mesure rigoureuse des effets de MARKIN sur les apprentissages – cette mesure sous-entendant de mettre en place un dispositif de recherche dont l’ampleur dépasserait clairement le cadre de ma fonction d’enseignant – les témoignages des élèves et l’accompagnement de ces derniers dans le travail d’analyse des rétroactions produites via MARKIN ne laissent que peu de doutes sur les avantages réels de cet outil, pour autant qu’il soit combiné à des contenus de remédiation pédagogiquement efficaces et qu’il soit utilisé en respectant les invariants d’un feedback à valeur pédagogique réelle (ex : temporalité de la rétroaction choisie à bon escient, informations riches, utiles et interprétables par l’élève, possibilité pour l’élève de distinguer les manières de s’améliorer,…).
Parmi les avantages les plus souvent soulignés par les élèves, notons par exemple celui de pouvoir « faire quelque chose » de la copie remise, à savoir : ne pas la ranger dans le fond du cartable mais entreprendre le parcours de remédiation proposé à chaque élève au travers du feedback produit par MARKIN. Les élèves apprécient également l’impression de présence accrue de l’enseignant dans le feedback et au travers du parcours de remédiation proposé. Il n’est pas anecdotique non plus pour les élèves de mettre en avant le simple (mais essentiel) avantage de pouvoir déchiffrer, lire et comprendre les annotations insérées dans les copies, contrairement aux copies corrigées au traditionnel bic rouge et où la capacité à comprendre la rétroaction dépendra notamment de la qualité graphique parfois très relative des annotations du professeur. Enfin, les élèves notent aussi l’avantage de pouvoir stocker les feedbacks tout au long de l’année et de pouvoir revenir sur les erreurs précédemment produites pour retravailler les contenus de remédiation ou observer des exemples d’erreurs dont ils ont désormais conscience.
Au terme de la présentation, je partagerai quelques informations relatives à la naissance d’un projet de mon établissement visant à proposer une remédiation hybride à tous nos élèves durant l’année mais aussi sous forme d’une école d’été, et ce afin de lutter contre l’échec scolaire et le redoublement. J’expliquerai en quoi MARKIN fait partie des stratégies que nous souhaitons développer pour mener à bien cet objectif et ferai un bref retour d’expérience par rapport aux premières étapes de déploiement de cet outil auprès des collègues de langues.
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