Si l’algorithmique et la programmation font depuis plusieurs années pleinement partie de l’enseignement mathématiques au collège puis au lycée, force est de constater que, dépendant de leur collège d’origine comme de leur pratique personnelle, le niveau des élèves en Seconde demeure hétérogène.
Un challenge de plus à relever pour les enseignants déjà demandeurs de formations et d’accompagnement dans ces nouveaux enseignements. Florent Girod et Sylvain Etienne, tous deux professeurs de mathématiques (respectivement en lycée général et collège) et membres du réseau T3 France, ont eux-mêmes été confrontés à ces difficultés y compris en formation pour TI et ont réuni dans un ouvrage dédié une série d’activités pour accompagner la transition entre Scratch et Python.
Pour Ludomag, nous les avons interrogés sur leurs motivations.
Pour quelles raisons avez-vous tous deux souhaité publier cet ouvrage ?
Pour en comprendre les raisons, il faut revenir aux objectifs de l’enseignement de la programmation au collège et au lycée. Ils sont au nombre de deux :
- Développer la pensée algorithmique, sachant que les algorithmes font partie de la vie, et pas seulement des mathématiques, basés sur le fonctionnement logique (comme « Si le feu tricolore passe au rouge, alors je dois m’arrêter »),
- Changer de paradigme sur le numérique, et accompagner les élèves pour qu’ils passent du numérique récréatifaunumérique éducatif.
Ces deux objectifs donnent une idée de l’importance de la mission des enseignants dans ces nouvelles matières.
Or, en tant qu’enseignant, il a fallu se former et cela n’est pas toujours évident pour tout le monde. Tous les professeurs n’ont pas encore acquis leurs repères et compris l’importance du temps à passer en début d’année de Seconde pour pouvoir ensuite utiliser régulièrement la programmation.
Cependant, les élèves qui ne partent pas sur de bonnes bases en Seconde se retrouvent en difficulté en Première.
Il faut repartir du vécu des élèves en Scratch, rapidement utiliser les calculatrices en effectuant une mise à jour et donner aux élèves quelques programmes qui seront utilisés ou complétés au moment des premières utilisations.
Ces programmes doivent être accessibles et ludiques car certains partent du principe qu’ils n’y arriveront pas, et c’est dommage.
Pouvez-vous résumer l’objectif du livret ?
Le livret poursuit 2 objectifs principaux :
- Proposer des activités en classe (de 3e et de 2de) qui sont intéressantes (nous l’espérons !)
- Permettre aux enseignants de 2nde de se rendre compte de ce que les élèves savent déjà faire en fin de cycle 4 et guider ceux de collège vers des pratiques en Scratch qui permettent une meilleure transition vers la programmation par texte comme le langage Python.
Pour faire simple, le livret permet de gagner du temps ! Nous avons « essuyé les plâtres » ces dernières années, en n’ayant pas forcément des outils adaptés pour entrer dans ce langage.
Nous pensons que l’approche graphique couplée à une mise en perspective des connaissances des élèves par Scratch est une entrée pertinente, mais surtout nous engageons les enseignants à code r, coder, et coder encore, sur des exemples simples pour prendre confiance, se tromper et recommencer !
Faire des erreurs est une étape indispensable pour progresser en tant qu’enseignant et par rapport à nos élèves.
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Pourquoi est-ce si compliqué de passer de Scratch à Python selon vous ?
Le passage de Scratch à Python est un passage d’une programmation par blocs à du code (texte). Une syntaxe est donc à acquérir, très simplifiée par la calculatrice, mais la difficulté est ailleurs :
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- Cela demande de la rigueur : une erreur de saisie même infime et ça ne fonctionne pas. C’est très formateur.
- Les indentations, c’est-à-dire l’organisation même du programme, ne sont pas évidentes à appréhender.
Scratch permet de débroussailler l’aspect algorithmique. Python offre une autre entrée (par la programmation) de certains points du programme de mathématiques et de sciences ; ces approches peuvent être complémentaires.
Une activité en particulier à recommander ?
Florent : Si nous devions en choisir une, ce serait sans doute l’activité « réussir son putt » (Page 41). Cela nous a amusé d’essayer de faire un graphisme attirant – ce qui n’est pas le but d’un langage comme Python, dans une activité dans laquelle l’enseignant n’intervient pas.
L’élève constate tout seul s’il a raison ou tort, teste différentes méthodes jusqu’à trouver la plus efficace.
C’est typiquement une activité idéale pour la classe de 2nde, qui permet de toucher un large public y compris ceux qui n’ont a priori pas d’appétence pour la programmation.
C’est aussi l’objectif du livret : lutter contre les idées reçues et, en proposant des activités motivantes et progressives, montrer que tous les élèves peuvent réaliser des créations intéressantes.
Sylvain : L’activité sur l’Etoile de Pompéi me semble intéressante à plusieurs niveaux au collège. On peut commencer, en 6e par exemple, par donner cette figure à reproduire sur papier. Puis en début de cycle 4, demander une reproduction sur un logiciel de géométrie dynamique. Enfin, en 3e, demander la reproduction de cette même figure d’un point de vue algorithmique permet de revisiter les figures géométriques de base, la notion de sous-programmes (bloc utilisateur), de boucles. C’est très complet.
De plus, il y a plusieurs programmations possibles, certains élèves font figure après figure, d’autres voient de façon concentrique. Il faut parfois revenir sur le code précédent pour pouvoir intégrer de nouvelles figures. Enfin, des différentiations sont possibles, ce qui permet de mobiliser tous les élèves sur la tâche. Cerise sur le gâteau : certaines constructions sont affichées sur l’ENT ou sur les murs de classe, ce qui valorise les élèves.
Merci à Sylvain Etienne et Florent Girod d’avoir répondu à nos questions !
Leur livret est disponible à cette adresse et en PDF à télécharger.
Le module ce_turtle pour TI-83 Premium CE Edition Python est disponible (parmi d’autres) à cette adresse.
Article diffusé dans le cadre d’un partenariat media.