Dans le contexte de confinement lié à la pandémie relative au COVID-19, ce court texte s’inscrit dans une série de réflexions partagées en construction pour penser les difficultés dans la durée et les franchir ensemble autour d’une organisation résiliente et endurante.
Accompagnement et complémentarité entre professeurs et parents
La continuité pédagogique mise en place dans cette situation de confinement implique un renforcement du partenariat entre les professeurs et les parents et une appropriation de nouvelles modalités de communication via les outils numériques.
Les déclinaisons de ce partenariat ont, de tous temps, été très variables, parfois teintées de franches incompréhensions, parfois sources de tensions, parfois harmonieuses et sources de projets constructifs pour les enfants.
Communiquer plus dans une période où la consigne générale invite à s’enfermer chez soi aurait pu paraître relever d’une injonction paradoxale il y a peu de temps, mais aujourd’hui cela ressemble à un paradigme sociétal qui met en avant l’ampleur occupée par les solutions numériques dans nos vies.
Réussir à maintenir une bonne qualité relationnelle dans ce partenariat « désincarné» mériterait d’être l’une des premières préoccupations des enseignants.
La délicatesse et la bienveillance sont plus que jamais à encourager car il n ‘est pas sans risque pour les enseignants d’entrer ainsi dans l’univers familial sans précaution, tout comme il existe un risque pour les parents de « jouer le rôle » de professeur auprès des enfants.
En effet, si enseigner est un métier qui requiert une certaine posture de sachant et de maîtrise, le « métier de parents » s’opère selon d’autres modalités relationnelles avec un enjeu affectif majeur qu’il convient de préserver dans cette situation où les enfants ont d’abord besoin d’être rassurés par les adultes.
Différencier le rôle d’enseignant et celui de parents s’avère plus difficile dans le contexte actuel et pourtant cette distinction est essentielle. Pour l’enfant, professeurs et parents sont deux personnes bien distinctes mais toutes deux sont investies d’un pouvoir d’ autorité plus ou moins bien accueilli par l’enfant, en fonction de son âge, de sa personnalité.
Le risque dans cette situation très nouvelle et complexe de continuité pédagogique serait de créer une posture bancale de « parent-enseignant », source de malentendus pour l’enfant, source de potentielle concurrence pour les adultes et d’inutile dépense d’énergie pour tous.
La relation parents enseignants dans la période de confinement.
Les enseignants, soucieux pour les apprentissages de leurs élèves, envoient dans l’espace familial du travail à faire, souvent via des outils numériques. Ils s’adressent plus particulièrement aux parents, pour les niveaux scolaires de l’école primaire, puis en collège et lycée, plus directement aux élèves.
On pourrait penser qu’il s’agit de l’équivalent des devoirs à la maison mais souvenons-nous alors que ces devoirs, à juste raison, avaient été allégés selon les instructions officielles (amplification des inégalités sociales et génération de conflits familiaux…).
Il semble important de bien veiller à construire une cohérence éducative au fil de ces échanges, dans le respect mutuel des rôles de chacun.
Quelques conseils :
- Limiter au maximum les messages qui relèveraient d’une injonction et privilégier les recommandations.
- Veiller à ajuster la quantité et la difficulté du travail, afin que l’enjeu scolaire soit facilité à la maison (l’important est le lien tissé et la ritualisation des activités ; nous y reviendrons dans un prochain texte).
- Prendre le temps d’écouter, de recueillir les avis des parents dans leurs actions vis à vis des enfants, c’est essentiel.
- Co construire et partager des moyens de communication hybrides (numérique, téléphonique, postale s’il le faut) avec les élèves, avec les parents.
Le professeur, notamment à l’école, devient pour ce temps exceptionnel du confinement, un « accompagnant pédagogique » pour les parents.
Il s’agit d’une part de rendre compétent l’adulte dans son action vis à vis de l’enfant/élève.
Il s’agit d’autre part de donner confiance aux parents et à travers eux aux élèves pour cette période complexe.
L’intention psychopédagogique est ici de préserver les liens familiaux et de renforcer la confiance des parents, celle des élèves pour continuer à agir et à apprendre.
N’oublions pas que de nombreuses familles traversent ou vont traverser des moments douloureux et des problèmes de santé. Aussi, préserver le lien, maintenir une bienveillance, prendre soin les uns des autres sont des priorités pour s’inscrire dans la durée et préparer l’avenir pour tous.
Prenez soin de vous.
Claire Anatole, Psychologue de l’Éducation nationale, académie de Créteil.
Axel Jean, bureau du soutien à l’innovation numérique et à la recherche appliquée, Direction du numérique pour l’Éducation.