A l’occasion de l’université d’été de Ludovia, 16ème édition, de nombreux enseignants et autres membres de la communauté éducative vont venir présenter leur expérience avec le numérique sur le thème de l’année, « Intelligences & représentations du numériques dans l’éducation ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût de ces ateliers jusqu’au début de l’évènement, mardi 20 août.
Romain Bourdel-Chapuzot présentera « Et si on bougeait sa salle de classe en même temps que sa pédagogie ? » sur la session III, Espacces & temps d’apprentissage.
Problématique pédagogique :
Les élèves semblent peu autonomes, mettant un certain temps à se mettre au travail lors des activités. De plus, les inégalités sociales se ressentent dans les résultats des élèves. En effet, bien que les élèves fréquentent le même collège, l’environnement familial a un impact non-négligeable sur la réussite ou non des élèves.
Il y a un peu plus de deux ans (en mars 2016), un enseignant de sciences physiques commence à travailler en classe inversée pour tenter de trouver une solution à la gestion de l’hétérogénéité des élèves. S’opère alors une modification du travail mené en classe : davantage de travaux en groupes de 4 élèves, des manipulations qui ne sont pas faites par tous les élèves en même temps.
A la fin de cette année 2017, le changement continue dans l’équipe de sciences puisqu’une enseignante rejoint Romain pour mener un projet de plans de travail communs SVT-SPC. Dans ce mode de fonctionnement, là aussi le travail de groupe prend de l’ampleur, les groupes pouvant aussi choisir l’activité sur laquelle ils travaillent. Les élèves gagnant en autonomie, une salle flexible, permettant de créer plusieurs lieux dans la salle ou plusieurs configurations en fonction du type d’activité semble le prolongement de la réflexion engagée au sein de l’équipe.
Apport du numérique :
Le numérique a une place importante dans ce projet sur deux axes principaux : le travail des enseignants entre eux et le travail des élèves.
Au niveau du travail des enseignants, la préparation de ce projet, qui se déroule sur l’année avec des thèmes et des supports communs, a nécessité l’utilisation d’outils collaboratifs. Ainsi, la suite Google drive a été utilisée afin de pouvoir préparer les progressions, les thèmes des plans de travail ainsi que les contenus de manière à pouvoir travailler en direct en distanciel. Le stockage des fichiers a aussi permis de voir comment il était possible d’articuler les activités entre elles.
Cette suite est aussi utilisée pour le suivi du travail des élèves, que ce soit de manière individuelle (investissement, cours écrit ou non, évaluation blanche faite ou non, évaluation par compétence avec traduction en note) ou au niveau du groupe (suivi des activités traitées et possibilité ou non de faire du tutorat).
La mise à disposition des ressources a aussi été un questionnement important puisqu’il fallait qu’elle réponde à deux contraintes :
– Centraliser tous les types de ressources afin d’éviter leur éparpillement, ce qui perdrait les élèves ;
– Proposer un mode collaboratif afin que nous puissions, chacun de notre côté, alimenter ces ressources sans que l’un ou l’autre soit obligé de tout faire.
Nous avons donc utilisé le logiciel Genially qui permet de centraliser et d’intégrer les différents types de ressources que nous mettons à disposition (vidéo sur YouTube, trace écrite que doivent recopier les élèves) tout en proposant un mode collaboratif où les deux enseignants peuvent agir sur le même document.
Exemple de mises à disposition des ressources : http://frama.link/pdtgate
Le numérique est aussi présent dans la partie « évaluation » puisque les quizz formatifs utilisent l’application Plickers. Celle-ci permet un feed-back immédiat pour les élèves mais aussi pour l’enseignant (en effet on peut voir si une notion est bien comprise par les élèves ou non). Elle permet également de procéder à de la remédiation par groupes grâce aux réponses enregistrées. Elle est pour le moment préférée à d’autres solutions (comme Socrative par exemple) car elle ne nécessite pas un appareil par élève.
Toujours au niveau de l’évaluation formative, les ressources de la BRNE (Banque de Ressources Numérique pour l’École) sont utilisées (Maskott) grâce aux modules « S’entraîner » qui permettent aux élèves de faire un bilan qui est corrigé en direct.
Enfin, le numérique est utilisé par moi-même au niveau de la création des capsules de physique-chimie puisque je les réalise.
Chaîne YouTube : https://www.youtube.com/channel/UC68IvJaDHQWwNRiczJB6sMg
Nous sommes aussi dans l’attente d’une mise en place de l’offre Office 365 dans le collège afin de pouvoir utiliser des outils collaboratifs pour les élèves comme ClassNote Book ou Teams. Cela permettra de continuer à développer les interactions enseignants-élèves mais aussi les interactions entre les élèves.
Relation avec le thème de l’édition :
Le travail que nous menons semble en lien avec le thème de l’édition puisqu’il permet de mettre en perspective l’apport du numérique dans ce que l’on fait en classe.
En effet, le but est d’utiliser le numérique de façon efficace sans tomber dans du « tout numérique » juste pour utiliser du numérique.
Ainsi, bien que le numérique soit présent dans notre pédagogie, nous restons attachés à l’utilisation du cahier, les élèves aussi lorsque l’on voit le soin qu’ils y mettent lorsqu’ils travaillent. Cependant, il est évident que beaucoup de choses ne seraient pas possible sans l’apport du numérique, ne serait-ce que pour la mise à disposition des ressources.
Synthèse et apport du retour d’usage en classe :
L’action se déroule sur deux plans : la partie pédagogique et la partie sur l’aménagement des espaces.
En ce qui concerne l’aspect pédagogique :
Le travail se fait à l’aide de plans de travail communs en SPC et en SVT, les élèves ayant, au début de chaque plan de travail, une vision globale de ce qu’ils auront à faire pour les 6 semaines à venir. Les élèves n’ont qu’un cahier de sciences pour les deux disciplines.
Le travail en classe consiste en :
– des activités (documentaires, expérimentales, démarche d’investigation) en autonomie (ils choisissent en début de séance quelle activité ils veulent faire);
– des exercices ;
– des évaluations formatives pour la remédiation (en utilisant Plickers) ;
– une évaluation blanche (qui peut aussi être faite en partie à la maison) ;
– du tutorat entre pairs ;
– le visionnage de capsules de 2-3 minutes ;
– une évaluation sommative de fin de plan de travail.
Le travail est fait en groupes de 4 (ou 3), chaque élève ayant un rôle déterminé pour l’ensemble du plan de travail (repéré à l’aide d’un badge porté pendant la séance). L’appel à l’enseignant est régulé par l’utilisation des tetraaide qui permettent aux élèves de déterminer le degré d’urgence de leur question.
A la maison, les élèves ont comme travail :
– le visionnage des capsules ;
– l’écriture du cours.
– L’accès aux ressources se fait via le site du collège (Genially).
Dans la volonté de valoriser les élèves en pratiquant une évaluation positive, nous pratiquons l’évaluation formative au cours des activités ainsi qu’à l’aide de Plickers, certaines des questions traitées avec Plickers se retrouvant dans l’évaluation finale.
Pour préparer l’évaluation finale, les élèves ont aussi une évaluation blanche qui est corrigée en classe par les pairs de manière à ce que les élèves puissent utiliser leurs erreurs comme un levier d’apprentissage (et non une erreur-sanction).
En ce qui concerne l’aménagement :
Assez rapidement et grâce à l’impulsion du chef d’établissement nouvellement arrivé, une proposition de rénovation des salles de sciences est faite au conseil départemental en 2017. Cette proposition reprend le travail de Danièle Launer, enseignante à Parmain dans laquelle les paillasses sont réparties de la façon suivante : 5 paillases fixées au sol (pour l’électricité) au niveau de la colonne centrale et 10 paillasses sur roulettes dans les deux colonnes latérales. Cette configuration permet de créer plusieurs dispositions en fonction des activités et des besoins. Sur les murs, des tableaux sont installés pour travailler de manière mutuelle.
Cette proposition n’a pas eu de suite, dans un premier temps.
L’année suivante, en 2018, la proposition faite par les enseignants de sciences va plus loin et propose un aménagement sur deux salles. Une salle est concernée par la proposition expliquée juste au-dessus et une salle avec plusieurs espaces différents.
Cette salle est le résultat de l’inspiration de plusieurs salles existantes mais adaptée aux sciences. Dans cette salle, on retrouve deux îlots surélevés (à l’image des mange debout installés par Bruno Vergnes dans sa salle), quatre tables de type 3.4.5 qui permettent de travailler individuellement (certains élèves ont besoin de se retrouver seul pour travailler) ou de créer facilement un groupe de travail. On trouve aussi 3 îlots de manipulation (nous sommes quand même dans une salle de sciences et il faut du matériel adapté, notamment pour les manipulations de chimie), 8 chaises de type Node qui permettent de créer des groupes de tailles variables, de faire des points en groupe, le tout sans figer l’espace. Enfin, on trouve un coin de consultation de ressources sur des poufs (consultation de vidéos, de livres…). Sur les murs, on retrouve aussi des tableaux pour les élèves. Sur ces deux salles, des points d’eau sont présents pour la vaisselle de la verrerie mais la paillasse de l’enseignant a disparu puisqu’elle n’est plus nécessaire.
Cette proposition a pu être présentée (après validation par l’inspection de physique-chimie) par un des enseignants lors d’une réunion avec le conseil départemental au collège (réunion qui concernait la globalité des travaux de l’établissement), en présence du directeur de l’éducation du CD13. Elle a trouvé un écho favorable et le projet a été enclenché.
En attendant les travaux, si on changeait déjà la salle de sciences ? Quelle est la salle la plus figée au niveau de sa disposition dans un collège ? C’est sans doute la salle de sciences avec ses paillasses fixées au sol puisqu’elles sont raccordées à l’électricité et/ou à l’eau.
Mais cette configuration ne semble plus répondre aux demandes des programmes et des instructions. En effet, on demande de plus en plus aux élèves, certes de manipuler, mais aussi d’élaborer des protocoles ou de résoudre des tâches complexes. Le TP “presse-bouton” n’est plus d’actualité. Aussi, il faut tenter d’adapter la salle aux pratiques pédagogiques mises en place, pratiques qui ne s’accommodent pas nécessairement facilement des infrastructures existantes.
Voici les aménagements faits dans notre salle, aménagements qui ne coûtent quasiment rien. On commence par le fait d’avoir bloqué les éviers. En effet, ils se bouchaient souvent et étaient très sales. On utilise donc l’évier de l’enseignant et les élèves ont accès au laboratoire qui est attenant à la salle. Cela a permis de récupérer de la surface disponible sur la table. Les élèves mettent notamment les tetraaide sur les plaques blanches.
Continuons avec les bandeaux verticaux qui « empêchent la chute des objets » (c’est ce qui écrit dans un catalogue). Le souci de ces bandeaux, c’est qu’ils empêchent les élèves de pouvoir se retourner et travailler avec le cahier. La solution ? Les dévisser. Autre possibilité, les revisser à l’envers pour que ça ne dépasse pas. Nous avons la chance d’avoir un agent technique qui a assuré les finitions (installation de champs et jointage).
En ce qui concerne les tableaux, nous avons pu récupérer ceux qui avaient été changés (soit parce que les collègues souhaitaient un tableau blanc et donc le tableau à craie ne servait plus, soit parce que la salle était rééquipée). Nous avons la chance d’avoir des paillasses décollées du mur donc nous avons pu les fixer et les élèves en profitent pleinement. Afin de récupérer de la surface au sol et dans l’optique d’offrir aux élèves un nouvel espace (consultation de ressources), la paillasse de l’enseignant ainsi que l’estrade sur laquelle elle se trouvait ont été retirées. Il ne reste plus que le point d’eau qui est utilisé par les élèves.
Enfin, un aménagement qui vient de l’élémentaire, ce sont les balles de tennis sous les tabourets. En effet, certains tabourets n’avaient même plus les embouts en caoutchouc. Le bruit était assez pénible à chaque manipulation de tabouret. L’installation des balles (récupérées au club de tennis voisin) a permis d’enlever cette nuisance. Les élèves sont demandeurs de ce type d’aménagement puisqu’ils allaient en priorité vers les tabourets équipés lorsque toutes les balles n’avaient pas encore été installées.
Plus d’infos sur : Romain Bourdel-Chapuzot
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