Pour la quinzième édition du Colloque scientifique Ludovia#16, 36 communications vous seront présentées sur le thème « Numériques & représentations ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût du colloque jusqu’au début de l’événement, mardi 20 août.
Camille Roelens présentera « De la représentation de deux figures d’autorité de la culture numérique » le mercredi 21 août.
Résumé de la communication:
« L’art du récit (…) s’est transporté dans la fiction cinématographique et télévisuelle. L’heure n’est-elle pas venue (…) de rendre au récit une place à la hauteur de sa primauté structurante dans l’imaginaire contemporain ? N’y a-t-il pas là une riche source de sens à capter ? » (Blais, Gauchet et Ottavi, 2008, p. 111)
Cette communication sera consacrée aux représentations cinématographiques 1° d’éléments des biographies des co-fondateurs respectifs de Facebook et d’Apple 2° d’éléments de l’histoire des deux entreprises précitées. Les œuvres convoquées seront The Social Network (Fincher, 2010) et Steve Jobs (Boyle, 2015). Un créateur, et à travers lui une logique de création, relient les deux œuvres : le scénariste Aaron Sorkin. Ces deux films ne se veulent pas des biographies « officielles » des deux personnages ni des documentaires. Il s’agit, de l’aveu même de Sorkin, d’une manière de se saisir de deux individualités singulières pour assumer un propos plus global sur l’individualisme contemporain et sur les transformations du lien social que révèlent (et parfois approfondissent) les déploiements du numérique dans les dernières décennies. L’analyse des films s’appuiera sur les travaux de Jullier (2012 ; Cléder et Jullier, 2015). L’histoire culturelle sera également d’un précieux recours pour notre analyse de ces récits. Selon Ory (2007), une fiction historique, ici la forme singulière du biopic, est souvent plus « utile » pour saisir l’esprit de l’époque et des intentions dans lesquelles elle est réalisée, que pertinente comme source de l’histoire documentaire et de la perception de la réalité historique des faits racontés.
Sera donc proposée une approche herméneutique des différents choix scénaristiques réalisés dans ces deux films, approche elle-même inscrite dans un travail de recherche philosophique sur les concepts d’autorité et de « connexions démocratiques » (Roelens, 2018a, 2019) dans ce que Gauchet appelle Le nouveau monde (2017).
Ce dernier présente l’espace public médiatique contemporain (p. 336-358) et plus particulièrement Internet comme la première utopie concrète, celle d’un lien social uniquement volontaire, où l’on peut être connecté avec qui l’on veut où qu’il soit, mais uniquement les personnes « voulues », une société volontaire d’individus libres et consentants. L’univers numérique et ceux qui contribuent à l’étendre « feraient autorité » comme pourvoyeurs d’une traduction instrumentale de l’individualisme au XXIème siècle. Il ouvrirait le champ des possibles d’une contre-société basée sur la désintermédiation, la « publicisation du privé » et les connexions choisies. Toutes choses analysables à la lumière des représentations de deux de ses plus célèbres figures.
[1] Ce pourquoi des ouvrages bibliographiques seront mobilisés (Isaacson, 2011 ; Ichbiah, 2018) mais sans s’y limiter.
[2] M. Gauchet a également dirigé les travaux de thèse de Loveluck, ensuite publié (2015), et liant histoire du numérique et pensée politique. Voir aussi sur ce point Cazeaux, 2014.
Plus d’info sur : Camille Roelens
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