À partir de la rencontre avec madame Anne Chiardola, je présente les responsabilités particulières du travail d’inspecteur en France et comment au Québec, on voit au grain.
J’ai rencontré madame Chiardola pour la première fois à un de ces petits goûters qu’on affectionne au Laboratoire d’Innovation et Numérique pour l’Éducation (FabLine) où j’effectuais alors un court stage.
Anne Chiardola, inspectrice de la circonscription Le Cannet du rectorat de l’Académie de Nice ne correspond pas à l’image qui vient en tête, particulièrement au Québec, quand on imagine un inspecteur de l’Éducation nationale.
Quelques semaines plus tard, lors de la présentation du projet Antibes 2317 et du projet Créé ta ville avec David Cohen, elle a éveillé mon attention.
Ce qui m’a convaincu qu’en plus d’être une femme de tête, elle est aussi une femme de coeur, est l’enthousiasme, la passion et la précision de la réponse donnée à la question que je lui ai posé suite à sa présentation, au sujet des observables d’un enseignement et d’un enseignant créatifs.
Être inspecteur de l’Éducation nationale
Il y a évolution du rôle de l’inspecteur, de celui qui a charge d’évaluation des enseignants-es vers un rôle d’identification des besoins de l’enseignant-e et d’orientation de ce dernier vers les formations qui lui seront utiles, s’il-y-a-lieu.
C’est particulièrement à partir de l’année scolaire 2017/18 que le principal changement a eu lieu, vers un rôle de rendez-vous de carrière, d’orientation de l’enseignant-e sur leur parcours afin de les aider à grandir en tant que personne, de se sentir valorisés et même proposer une certaine mobilité professionnelle.
Lors de l’inspection, on favorisera alors un changement de posture de celui qui enseigne, d’une évolution dans la relation maître-élève, lui apprendre à être agile avec son contenu pédagogique tout en l’encadrant de règles claires et d’un consensus de respect mutuel avec les élèves. L’inspecteur doit apporter du soutien aux comportements positifs de l’enseignant-e, être honnête et démontrer beaucoup de transparence dans la relation entretenue avec ce dernier. Les interventions consistent souvent à encourager de micro-gestes, de micro évolution de l’attitude de l’enseignant-e afin qu’ils deviennent des référents pour les élèves, afin qu’ils perçoivent leur classe comme un lieu de justice et d’équité que ses élèves projetteront de cette micro-société vers une société élargie.
L’enseignant-e créateur, créatrice
Lors de ses visites auprès des enseignants-es dont elle a charge, voici ce qu’elle observe chez l’enseignant-e créatif-ve, observations données ici en vrac :
– maitre sort d’une posture de contrôle vers une posture de bienveillance, de lâcher prise, d’une face à face vertical à une attitude accompagnante de côte à côte : ensemble résumes dans un même projet.
L’enseignant doit accepter lui aussi de se tromper, de ne pas tout savoir, de le dire et de mettre en ouvre une démarche inspirante pour montrer comment agir pour apprendre. L’enseignant est lui aussi un apprenant à vie, flexible, réflexif.
Il doit développer une posture de plus grande tolérance à l’ambiguïté pour accueillir toutes le propositions des élèves sans préjugés et sans jugement. L’enseignant doit savoir incarner son métier, transmettre ses propres valeurs, qui il est vraiment et pour cela il doit se connaître lui-même.
– Enseigner est un long chemin vers soi aussi – dit Anne Chiardola.
– engagement tangible des élèves dans l’activité d’apprentissage ;
– augmentation des actions créatrices chez les élèves en demandant à tous de trouver plusieurs propositions à une demande dans le principe de la résolution problèmes ;
favoriser le passage d’une pensée divergente chez les élèves en développant leur esprit critique, en argumentant, en acceptant les points de vue différents ;
savoirs et futures compétences sont développées ensembles.
Anne est photographiée ici avec Patrick Arceluz de la DNE et Prof. Dr. Margarida Romero, PhD, @margaridaromero, Directrice du Laboratoire d’innovation et Numérique pour l’Éducation.
Anne Chiardola poursuit également une recherche en vue de l’obtention d’un doctorat à l’Université d’Aix-Marseille. Sa thèse porte le possible impact du numérique éducatif dans l’effet territoire en éducation. Et notamment sur les gestes professionnels avec l’utilisation du numérique éducatif des enseignants des milieux ruraux comme source possible d’une meilleure réussite des élèves ruraux. La posture du chercheur permet aussi une posture réflexive sur sa personnalité, en restant à l’écoute du terrain, en observant finement les moindres gestes du métier, raconte Anne Chiardola.
Qu’est -ce qu’un inspecteur de l’Éducation nationale?
Les inspecteurs de l’Éducation nationale (IEN) sont des cadres supérieurs et ils exercent leurs fonctions dans le cadre du programme académique.
Il existe quatre grands groupes d’inspecteurs de l’Education nationale en France :
• IEN chargés d’une circonscription du premier degré (IEN-CCPD),
• IEN chargés de l’information et de l’orientation (IEN-IO),
• IEN intervenant sur l’enseignement professionnel pour les enseignements généraux (IEN-EG),
• IEN intervenant sur l’enseignement professionnel pour les spécialités professionnelles (IEN-ET).
Les IEN ont pour fonction de mettre en œuvre la politique éducative du pays.
Source : Wikipedia
Les inspecteurs de l’Éducation nationale ont une diversité de missions. La principale étant la mise en oeuvre de la politique éducative de l’État. Ils ont aussi la charge d’évaluer le travail des enseignants, participent à l’animation pédagogique, conseillent les chefs d’établissements à la demande du recteur de l’académie à laquelle ils sont attachés, et assurent également des missions d’expertise.
Les inspecteurs d’académie
Ils ont au départ la fonction d’inspection et de notation des enseignants de second degré, ce qui correspond au Québec aux enseignants du secondaire et du Cegep.
L’inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN)
C’est Napoléon Bonaparte qui a créé en 1802 l’inspection générale de l’instruction publique.
La pensée de Catherine Becchetti-Bizot
Madame Catherine Becchetti-Bizot, inspectrice générale de l’Éducation nationale, première directrice du numérique pour l’éducation est présentement médiatrice de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur
Lors de son mandat précédent, en tant qu’inspectrice générale, madame Becchetti-Bizot a fait la promotion de l’usage du numérique dans l’enseignement. Elle a encouragé les enseignants à avoir une démarche qui intègre une véritable réflexion sur ce que ces nouveaux supports procurent, induisent et modifient dans l’approche pédagogique.
Lors d’une entrevue avec Claude Tran publiée sur Ludomag, elle explique sa conception de la classe inversée un emblème, un bon exemple en tout cas de ces nouvelles pratiques qui se développent dans les classes [ ]J’ai envie de dire aux enseignants qui hésitent à se lancer, de prendre des risques, et à remettre en question leur pratique sans craindre de se tromper, car dans ces démarches on a droit à l’erreur. . . . .
. . . les inspecteurs, le ministère, doivent eux aussi proposer des orientations et des cadres qui soient sécurisants pour les enseignants pour que leur liberté pédagogique puisse réellement se développer.
L’inspecteur doit aider à l’expérimentation, doit aider à la prise de risque de l’enseignant. Il doit l’encourager.
C’est ce nouveau rôle de l’inspecteur qui transparait dans la pratique d’Anne Chiardola.
Les inspecteurs au Québec
Pendant plus de 100 ans, nous avons eu des inspecteurs d’école au Québec qui visitaient les écoles dispersées sur l’immense territoire deux ou trois fois l’an. L’inspecteur, un sérieux personnage masculin, évaluait le travail des enseignants mais aussi avait pour tâche de faire passer les examens aux élèves. Il lui fallait augmenter le taux de diplomatie pour la région qui lui était confiée.
Dans les années ’60, après la création du ministère de l’Éducation on a abandonné les inspecteurs d’écoles au profit de conseillers pédagogiques. La qualité des services éducatifs est assurée par la direction de l’école. Mais c’est aussi de la responsabilité de la commission scolaire de rendre compte de la qualité des services éducatifs qu’elle dispense.
C’est ainsi que le directeur des services éducatifs d’une commission scolaire a un rôle qui se rapproche du rôle de l’inspecteur en France. En plus de représenter la commission scolaire, le directeur des services éducatifs doit coordonner les encadrements légaux, particulièrement ceux liés au renouvellement des programmes d’études et l’évaluation des apprentissages, répondre à des problèmes concrets d’apprentissage, assurer équitablement les services aux élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation, exercer une vigie des pratiques pédagogiques. Assurer un leadership pour favoriser le virage numérique, assurer la formation continue des enseignants.
Pendant ce temps, en Ontario . . .
Tout comme au Québec, il n’y a plus d’inspecteurs dans les écoles publiques. Par contre, la situation est différente pour les écoles privées qui fonctionnent comme des entreprises ou des organismes à but non lucratif. Contrairement au Québec, les écoles privées ontariennes ne reçoivent aucune aide gouvernementale et sont complètement indépendantes du ministère de l’Éducation. Cependant, si certaines écoles privées veulent accorder à leurs élèves les crédits nécessaires à l’obtention du Diplôme d’études secondaires de l’Ontario (DESO), elles seront des École privées inspectées.
Merci à Michel Guillou pour avoir eu la gentillesse de revoir le côté français du rôle de l’inspecteur.
Madame l’inspecteur ? On trouve des « Inspectrices » dans votre texte et ce titre « madame l’inspecteur ». Surprenant, même l’académie française s’est résolue à la féminisation des noms en français. Au Quebec, il y a longtemps que la question ne fait plus débat ! On est au XXIème siècle, Mme la journaliste et/ou rédactrice !