Dans de nombreux pays, les responsables ont équipé les classes d’un ou plusieurs écrans interactifs et de nombreux élèves sont dotés d’ordinateurs ou de tablettes individuelles. Nous allons voir comment fonctionne cette association et pourquoi la France accuse un sensible retard.
Les TIC pour les enseignants de bonne volonté
Selon la théorie de Rogers et Moore, les nouveautés présentent une courbe d’adoption en forme de courbe de Gauss, mais la métaphore du crayon en est une adaptation intéressante :
Les initiateurs et les affûtés sont attentifs aux nouveautés et sont prompts à tester ce que peuvent apporter les innovations. Les acteurs et les figurants sont une plus grande force d’inertie et il faut mettre en place des dispositifs pour les former et leur faire prendre conscience des apports potentiels.
Les effaceurs, eux, ne chercheront de toute manière pas à se remettre en cause et ce sont ceux qui servent de repoussoir lorsque l’on veut démontrer qu’une innovation n’est pas intéressante. Voir par exemple comment ont été interprétées les études de Karsenti[1] qui pourtant mettaient en avant l’intérêt des outils numériques.
Salle de classe de 1881 à 1950. On remarquera le peu d’évolution, y compris avec les salles actuelles. Musée-école de Boulogne-sur-Mer
Dans les années 1990, le « TEAL Project » (Technology Enhanced Active Learning)[2] avait mis en place des salles de classe où les élèves sont en groupes et disposent de grands écrans disposés tout autour de la salle de classe. Ce modèle a été repris ensuite par des écoles comme l’École Dalbé-Viau, de Lachine (Québec) qui a équipé ses salles de cours de tableaux interactifs pour chaque groupe d’élève. L’enseignant dispose d’un bureau au centre de la classe, mais c’est en navigant d’un groupe d’élève à un autre qu’il intervient le plus.
Et nous, et nous ?
La France est très en retard en ce qui concerne l’équipement technologique de ses écoles. Un enseignant qui peut disposer d’un écran interactif dans sa classe et de dispositifs individuels pour chacun de ses élèves est un privilégié.
On retiendra cependant que les divers fabricants ont proposé de longue date des outils permettant de faire communiquer les ordinateurs individuels/tablettes/téléphones avec le poste de l’enseignant/tableau numérique interactif TNI.
En effet, dès le plan IPT[3] (Informatique Pour Tous), les ordinateurs étaient en réseau et le serveur permettait de dispatcher les activités sur les machines des élèves.
Thomson MO5 avec son crayon optique, ses cartouches mémoires et sa connexion réseau. Par Deep silence (Mikaël Restoux) — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4930788
Avec l’essor des ordinateurs individuels, Apple, puis des éditeurs de logiciels PC ont proposé des applications capables de visualiser, partager le contenu des différents ordinateurs de la classe. Ainsi, l’enseignant pouvait « contrôler », assister, à la manière de ce qui se faisait alors dans les laboratoires de langue.
La démocratisation des vidéoprojecteurs a permis un essor rapide des tableaux interactifs de grande dimension et donc, tout naturellement, le tableau interactif est devenu la mémoire stratégique de la classe.
La France avec les opérations Primtice et ENR a mis en place de nombreux tableaux interactifs, puis des classes mobiles. La faiblesse de ces dispositifs a été le manque de formation et la faible enveloppe de ressources, ressources qui n’étaient d’ailleurs pas toujours en cohérence avec une utilisation classe mobile et TBI…
Pendant ce temps, les autres pays ont continué leur équipement en tableau puis écrans interactifs et la norme est devenue de pouvoir utiliser les outils personnels de l’élève (téléphones et tablettes) dans le cadre des activités pédagogiques. C’est ce que l’on appelle le BYOD.[4]
Écrans interactifs vs tablettes
Prenons maintenant une classe d’aujourd’hui, bien équipée. Elle dispose d’un ou plusieurs écrans interactifs qui sont utilisés de façon collective, en général sous la direction de l’enseignant, ou par groupe, pour du travail collaboratif.
Les élèves qui ne sont pas au (x) tableau (x) utilisent des tablettes, ou des outils plus traditionnels de la classe. L’avantage des tablettes est qu’elles permettent d’envoyer directement sur un grand écran le travail d’un élève ou d’un groupe d’élève afin de l’analyser en activité collective.
L’écran interactif n’est pas l’héritier direct du tableau noir, car il permet non seulement d’écrire, mais aussi d’afficher des contenus statiques ou dynamiques. Il remplace donc aussi tous les périphériques multimédias de la classe (rétroprojecteur, lecteur DVD…).
De la même façon, la tablette n’est pas un simple cahier ou une simple ardoise. Si elle permet d’écrire, elle permet aussi de prendre des photos, de consulter des sites, d’utiliser des applications d’entraînement. Elle remplace donc potentiellement les manuels, les cahiers, ardoises, boîtiers de réponse, fichiers et autres dispositifs.
Très important aussi, l’utilisation de ces outils permettent de désynchroniser les activités, ainsi chaque élève peut progresser à son rythme, avec un support adapté à ses difficultés, tout en étant toujours relié avec l’enseignant, que ce soit en classe, bien sûr, mais aussi à travers des ENT (Espaces Numériques de Travail), lorsqu’il est à la maison.
L’informatique et ses outils permettent d’importants changements, mais il faut lui constituer un cadre. Pourquoi et comment utiliser tel ou tel outil ? Ce sont les questions qu’il convient de toujours se poser avant d’entamer une (r) évolution. L’école a peu changé en deux siècles,
[1] Téléchargement du rapport en PDF. Il y a un résumé en français.
[2] TEAL: Apprentissage actif amélioré par la technologie.
[3] PDF de l’historique du plan IPT par un de ses acteurs, Jacques Baudé.
[4] Bring Your Own Device (Apporter votre propre outil/téléphone, tablette…).
Article diffusé dans le cadre d’un partenariat