Pour la quatorzième édition du Colloque scientifique Ludovia#15, 40 communications vous seront présentées sur le thème « Innovations & Institutions autour du numérique éducatif ». Ludomag se propose de vous donner un avant-goût du colloque jusqu’au début de l’événement, lundi 20 août.
Brigitte Sebbah présentera « L’émergence du Live en communication politique » le mardi 21 août.
La question de l’émergence du direct en ligne dans les stratégies numériques politiques nous a paru pertinente à traiter sous l’angle de l’avènement des transformations induites par le numérique, ses plateformes d’expression et d’information, ses pratiques et ses contenus, et la diversité de ses acteurs (politiques, citoyens, médias). L’objectif de cette étude consiste à explorer et interroger la notion de direct autorisée par des plateformes de réseaux sociaux numériques (Facebook, Snapchat, Twitter, Instagram) dans ses intersections, ses marges et ses multiples versants à l’heure de la plateformisation du numérique et des médias (Gillepsie, 2010) et de la digitalisation croissante et tâtonnante du politique. La nature même des événements, leur publicisation, leur médiatisation, leur politisation s’en trouverait modifiée (Mabi, Gruson-Daniel, 2017).
D’un côté, nous pouvons partir du constat circulant et idéalisant sur les effets du web pour le politique : ainsi à partir de la multiplication depuis la campagne de 2007 des plateformes numériques d’expression, de l’accélération de la publicisation des messages politiques (buzz), du levier que le numérique est censé constituer à la fois pour l’empowerment des citoyens et pour lutter contre la désaffectation du politique. Comme le soulignent Monnoyer-Smith et Wojcik (2014), il convient pourtant d’« éviter « le tropisme techniciste » et largement utopiste qui revient à consacrer le changement dans les pratiques politiques de manière homogène et par un lien causal avec les outils numériques, lien qui reste souvent impensé : « les chercheurs se sont évertués à saisir ce que la technologie « fait » au politique. Au détriment sans doute de l’élaboration de grilles d’analyse plus adaptées à l’objet technique et à l’évolution des pratiques ».
Nous partons ici de l’hypothèse que la dimension numérique dans une campagne, la multiplicité des acteurs et des plateformes, l’hybridation des énonciateurs, la reconfiguration des récits ou leur figement en ligne, n’entraîne nécessairement ni un pluralisme dans les pratiques, ni un renforcement du politique mais plutôt une mutation accélérée des procédés de communication politique qui conduirait à une réduction progressive et une possible absorption par le champ du marketing politique. L’objet de ce travail est de saisir et d’interroger la diversité de fait, la multiplication des pratiques des politiques en ligne et notamment sur ces Lives que nous identifions comme émergents dans ces pratiques et qui consacrent peut être l’établissement de stratégie numérique comme indispensables à la communication politique , à l’heure ou nombre de partis en 2017 n’avaient pas encore de service numérique dédié ou important ni de responsable de stratégie numérique.
L’objet de ce travail sera précisément à partir de ce cadre, de questionner les représentations des acteurs politiques eux mêmes en période électorale au sujet de leurs stratégies numériques en direct sur les réseaux sociaux numériques pour faire événement et s’adresser aux électeurs en temps réel. Nous faisons l’hypothèse que le live cristalliserait les évolutions de la communication politique numérique et constituerait ainsi un terrain idéal d’observation des (r)évolutions techniques et éditoriales. En prenant appui sur la sociologie des usages et la théorie de l’acteur-réseau, nous entendons questionner l’appropriation des dispositifs socio-techniques de lives en ce qu’elle peut révéler des changements plus profonds dans les pratiques de communication liées au support numérique.
Ces mutations peuvent-elles s’inscrire dans des modèles en voie de stabilisation ou est-on encore plutôt dans une phase d’expérimentation ? Comment caractériser le live comme pratique journalistique alors qu’il s’incarne dans des usages (et de discours sur ces usages) multiformes ? L’analyse portera in fine sur les conditions de possibilité de l’institutionnalisation du Live en politique, posant ainsi la question d’un processus en cours de constitution que serait un « nouvel écosystème numérique du politique ».
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